- Mar Nov 27, 2007 3:53 pm
#25963
Quel honneur, je vais pouvoir réagir en premier sur ce topic qui aurait déjà du exister depuis longtemps ici.
En ce moment je lis
Histoire de la Préhistoire, et à part ça je n'ai lu que
Le Mépris. Sur ces deux seuls livres, je peux déjà dire que ça ne ressemble pas du tout à un auteur de romans de gares!
Concernant Le Mépris, l'aspect qui m'a profondément passionné est la manière dont Moravia montre l'échec de la rationalisation masculine face aux mystères du comportement féminin. Le narrateur, en dépit de sa finesse de scénariste et de son intelligence exceptionnelles, échoue à comprendre sa femme, car il se repose uniquement sur des introspections rationnelles.
"Qu'ai-je dit de mal? Pas dit? Fait ou pas? Que voulait-elle dire exactement?..."
Je ne sais pas si on peut au sens strict considérer Molteni comme un AFC, mais en tout cas, contrairement à l'image très critique que ce forum véhicule sur l'AFC de base, celui-ci est plutôt admirable dans sa ténacité à vouloir rationnaliser l'irrationnel. Voie vouée à l'échec, car il ne perçoit correctement ni les signe d'intérêt, ni les IOD de sa femme, et surinterprète la plupart de ceux qu'ils capte malgré tout.
Il est pris au piège de sa compagne qui, bien que nettement moins intelligente que lui, agit suivant une animalité et une intuition féminine totalement insondable pour le cerveau masculin non averti.
L'analogie avec un Ulysse subtil, intellectuel, éloquent, civilisé et sophistiqué, opposé à une Pénélope femme traditionnelle, ancestrale, peu loquace, quasi animale, m'a littéralement ouvert les yeux.
Point intéressant: à la fin du livre, Molteni finit quand même par déterminer l'origine du mépris de sa femme à son égard, et ce par la seule puissance de son intelligence masculine. Il est juste triste pour lui d'avoir mis aussi longtemps à le comprendre par les chemins de la pensée, alors que "l'instinct masculin" aurait pu le lui signifier des mois plus tôt.
Bref, cette lecture de Moravia m'a fait voir ce à quoi j'ai échappé en découvrant la communauté (des années d'interrogations existentielles menant tout droit à la dépression). Il me paraît bien difficile d'y arriver tout seul, mais heureusement il y a la littérature. Et Spike