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By Prince
#14502 Il a disparu depuis quelques jours lors d'un simple vol de reconnaissance au dessus du Nevada. En espérant qu'il sera retrouvé sain et sauf, voici un portrait de cet aventurier exceptionnel paru dans le figaro d'aujourd'hui:

[quote] Les recherches se poursuivaient hier dans le désert du Nevada pour tenter de retrouver l'aventurier américain Steve Fossett, détenteur de très nombreux records de vitesse, d'endurance et de distance sur mer ou dans les airs.

Il faudra plus que quelques jours sans nouvelles pour convaincre les amis de Steve Fossett qu'il a pu lui arriver quelque chose. Ce personnage hors du commun a surmonté tant d'épreuves, triomphé de tant de défis, qu'il paraît presque impossible qu'une banale escapade en avion de tourisme puisse mettre fin à ses exploits. « Ce serait comme si Michael Schumacher tombait de vélomoteur », observe Peter Garrrison, éditeur de Flying Magazine. Personne n'imagine que James Stephen Fossett, 63 ans, ait pu se livrer à des figures acrobatiques avec son Bellanca Citabria, un appareil parfois utilisé pour la voltige. « Il n'était pas là pour chercher le frisson », assure David Small, 46 ans, qui a fait le plein de son appareil lundi. Il avait quatre heures d'autonomie, mais ni parachute ni vivres. Dans le désert, les températures peuvent dépasser les 30 °C le jour et tomber à 10 °C la nuit. « S'il y a un homme au monde mentalement et physiquement équipé pour se sortir de cette situation, c'est lui », confiait, hier, son ami et ancien rival Richard Branson, le patron de Virgin, qui veut essayer de le retrouver grâce aux images satellites de la zone.

Aventurier réfléchi, Fossett est avant tout un chasseur de records : il en revendique 117, dont 76 n'ont pas encore été battus. Courir après le vent (Chasing the Wind), le titre de son autobiographie, résume mal sa volonté de marquer l'histoire : « Dans chaque course, il y a un vainqueur, explique-t-il, mais dans un record, vous battez tous ceux qui s'y sont essayés avant vous. » Plus haut, plus vite, plus loin est sa vraie devise. Il est le seul homme à avoir fait le tour de la terre sans escale en bateau, en ballon et en avion solo.

Une forte tête, sûrement, mais pas une tête brûlée. « Je n'aime pas les risques, je passe beaucoup de temps à essayer de les limiter », racontait-il en 2003 au magazine Newsweek, qui l'avait désigné comme « le modèle de l'aventurier du XXIe siècle, un quart capitaine Cook, trois quarts Bill Gates. » Fossett est un planificateur, un préparateur méticuleux, un sportif tactique. Son CV ressemble à celui de Superman et pourtant il se dit « pratiquement normal. » Rien dans sa physionomie bonhomme, son front dégarni et son bon coup de fourchette, ne semble le vouer à la compagnie des plus grands sportifs. Son message au reste de l'humanité est : « Vous aussi pouvez le faire. »

Est-ce si sûr ? Steve Fossett a, entre autres, battu le record de la traversée de l'Atlantique à la voile en 2001, réussi le premier tour du monde en ballon sans escale en 2002 (à sa sixième tentative !), battu de six jours le précédent record du tour du monde à la voile en 2004 (58 jours), réalisé en 2005 le premier vol solo non-stop autour du monde en 67 heures, établi en 2006 le premier vol stratosphérique en planeur (15 447 mètres)...

Ces premières feraient presque oublier sa traversée de la Manche à la nage en 1985 (après trois échecs), sa participation en 1992 à la course de traîneau Iditarod Dogsled Race sur près de 2 000 km en Alaska, son ascension du Kilimandjaro et de quelque 150 autres sommets dans le monde, ses exploits en randonnée à ski, ses 23 records à la voile depuis 1993, ses participations aux 24 heures du Mans, au triathlon « Ironman » d'Hawaï (3,86 km à la nage, 180 km à vélo et un marathon de 42,195 km à la course), etc. Il n'y a guère que l'Everest qui lui ait résisté, séquelle d'une enfance asthmatique.

Palmarès d'autant plus extraordinaire que ce « recordman des records » a débuté plutôt tardivement. Il a d'abord fait fortune, comme courtier à la Bourse de Chicago, spécialisé dans les graines de soja. Par calcul : « J'avais étudié le niveau des revenus à Chicago et découvert que les deux activités qui rapportaient le plus étaient la bourse des valeurs et la bourse de commerce. J'ai pris un job chez Merryl Lynch et je me suis lancé dans les deux. » Il fondera ses propres sociétés de courtage, Lakota Trading à Chicago et Marathon Securities à New York, qui le placent à la tête d'une fortune de plusieurs centaines de millions de dollars. Il possède une somptueuse villa sur les hauteurs de Carmel, en Californie, où ont été tournées certaines scènes de Basic Instinct. Mais il ne parle jamais d'argent. « Ce n'est pas poli, dit-il. Je n'ai jamais rien révélé sur mes ressources financières. »

Pour lui, la Bourse était déjà un sport. « C'est à la corbeille que j'ai appris à fonctionner de manière rationnelle, même dans les circonstances les plus extrêmes », déclarait-il en 2000. Deux ans plus tôt, lors de sa quatrième tentative de tour du monde en ballon, il avait failli mourir au large de l'Australie, lorsque 150 000 m³ d'hélium s'embrasent au-dessus de sa nacelle, touchés par la foudre. Une chute vertigineuse de 9 000 mètres, pendant laquelle il a le réflexe de déclencher sa balise de détresse et de préparer sa cellule de survie. Il dérivera huit heures dans la mer de Corail avant d'être repêché.

La vie d'aventure n'est pas un long fleuve tranquille. Il faut être prêt à souffrir, à affronter le froid, la fatigue, les membres engourdis, à dormir quatre heures par nuit pendant des semaines, à ne s'alimenter que de crèmes chocolatées pendant des jours. Évidemment, il y a des compensations. Celle du résultat. « On se sent bien quand on y arrive », avouait-il l'an dernier à un intervieweur qui lui demandait pourquoi toujours chercher à être le premier et le plus rapide. Et aussi : « J'ai un seuil très bas de tolérance à l'ennui. »

À coup sûr, Steve Fossett a glané en chemin une belle collection d'anecdotes. Même si avec Peggy, sa femme depuis tretne-neuf ans, aussi allergique aux expéditions qu'il l'est au calme, ils n'ont jamais eu d'enfants à qui les raconter.

En 1991, lors de sa deuxième participation à la Iditarog Dogsled Race, son attelage de chiens s'était soudain refusé à continuer au milieu d'une tempête de neige. Fossett se mit à quatre pattes et mordit l'oreille du chien de tête, « pour lui montrer qui était le patron ». Ils finirent 47es. Un autre jour, son ballon s'écrase dans un village en Inde dont la légende locale prédit que le Singe d'or va revenir sur terre à bord d'un palais volant. Et voilà l'aventurier reçu comme un Dieu vivant : « Tout ce que je sais, c'est qu'un prêtre hindou m'offrait du lait sorti chaud de la vache, et j'ai cru plus sage de le boire. » Une autre fois, en s'entraînant à nager dans le lac Michigan, Fossett est arrêté par la police et jeté dans une cellule, avec des travestis.

Que lui est-il arrivé cette fois-ci ? Sa réputation et ses exceptionnelles réussites, il les devait, selon lui, a un talent méthodique pour se préparer, s'entourer, évaluer les risques et les gérer. Ne pas avoir déclenché de balise en cas de détresse ne lui ressemble pas, à moins d'un problème de batterie. Boy-scout dans sa jeunesse, il l'est resté depuis.

Tous ceux qui ont approché Steve Fossett parlent de sa simplicité cordiale, de son enthousiasme juvénile et de son sérieux professionnel. Il est, par excellence, l'homme qui a du respect pour le vent.

http://www.lefigaro.fr/reportage/200709 ... cords.html

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