- Ven Mai 01, 2009 11:08 pm
#73994
[size=117]"Donc, ce que je veux vous raconter, c'est ma première femme du monde, la première femme du monde que j'ai séduite. Pardon, je veux dire la première femme du monde qui m'a séduit. Car, au début, c'est nous qui nous laissons prendre, tandis que, plus tard... c'est la même chose."[/size]
Guy de Maupassant, Le verrou.
Nos existences contiennent du roman autant qu'il nous en faut. Parfois davantage.
Rudyard Kipling
Quand je dis à des gens qui ne me connaissent pas que je considère ma vie comme un roman, et que l'existence de chacun est susceptible d'être une histoire digne d'être écrite, on ne me croit pas toujours.
Pourtant, même les plus casaniers ont une histoire. Qu'elle soit vive ou lente, active ou léthargique, il y a toujours quelque chose à en dire. Il suffit de savoir la raconter.
Hier soir, la mienne m'emmenait en banlieue. Suffisamment loin de Paris pour que je fasse une exception à la règle et que je dédaigne mon journal et mon livre une fois installé dans ma rame, volant un peu de repos au tourbillon d'activité qui me fait virevolter et tourner la tête.
J'étais invité par un copain de longue date, mais pas intime pour un sous. De ces connaissances que l'on rencontre dans les clubs de sport, qui semblent toujours lointaine, et qui durent pourtant plus longtemps, parfois, que de grandes amitiés.
A l'approche du but je commence à me secouer. Il s'agit de ne pas se laisser sombrer dans l'indolence : il y aura une quarantaine de personnes, parmi lesquelles je n'en connaitrai qu'une, et j'ai envie de m'amuser.
Je le retrouve à une gare quelconque, je chasse les songes persistants de ma demi-sieste dans le RER en me mettant à parler à tue-tête dans la voiture, et nous arrivons.
Il ouvre la porte, j'entre à sa suite ; le temps de poser mes pieds sur un carrelage qui fait glisser mes bottines et je croise le regard d'une brune qui sort avec sa copine.
[quote]M : Bonsoir. Ce fut court.
E : [sourire] Mais, je reviens.
La porte se ferme et je commence à saluer ceux qui sont déjà là et à me faire remarquer. J'ai paradoxalement plus de facilité à dégager une énergie anarchique et bordélique quand je suis globalement fatigué. Le cerveau rationnel perd le contrôle, et le calme habituel qui est le mien s'efface devant le Chaos séduisant que chacun porte en soi.
Je la veux. Je m'en fais la remarque tout de suite, Marion est une fille typiquement spikienne (un FR qui me revient en mémoire) comme je n'en rencontre pas beaucoup. Une petite brunette toute fine, à la chevelure coupée en un carré dégradé et délicatement relevée qui laisse apparaître une nuque toute blanche que j'ai envie de mordiller doucement.
Je la veux, et je l'aurai.
D'ailleurs, le terrain est favorable : pour changer, il y a plus de filles que de mecs à cette soirée, prépa médecine et pharma oblige, et certains gars sont déjà officiellement pris (avec des filles présentes, qui plus est).
Résultat, je me sens comme un braconnier qui chasserait la gazelle en pleine savane à la mitrailleuse et avec un hélicoptère : il est littéralement impossible que je manque ma cible, et au pire, j'en tomberai au moins deux ou trois autres au passage sans le faire exprès.
Du reste, ça n'a évidemment pas loupé : avant même qu'elle ne soit revenue, j'en avais déjà une sur le dos. L'euphorie du moment a décidément des effets très agréables, dont le moindre n'est pas de faire entrer dans mon monde tous ceux qui passent à ma portée avec une grande facilité.
Ma mère voici le temps venu
D'aller prier pour mon salut
Mathilde est revenue
Jacques Brel
Je retrouve finalement Marion au détour d'un buffet, et le ballet commence. Le ballet, car nous n'en sommes pas les seuls danseurs : autour de la chorégraphie que forme notre duo qui se suffit très vite à lui même viennent graviter ceux qui ont intérêt à nous gêner. Autrement dit, ceux que nous intéressons.
Tout à mon dialogue fait de folie et de légèreté, que nous possédons autant l'un que l'autre ce soir là, je prends notamment en grippe sa copine.
L'amie de Marion est célibataire, et ça se voit. J'ai commis l'erreur de commencer par séduire le duo en quelques phrases d'accroche insouciantes et joueuses, pour faire naître les étincelles d'intérêt dans les yeux de ma brunette avant de préciser ma volonté et aussi pour amadouer son garde du corps. Mais il s'avère vite que le garde du corps en question qui répond au prénom de Juliana a réagit un peu trop fort à ma bonne humeur et s'est complètement laissée entrainer dans ma séduction.
Pendant de longues dizaines de minutes, alors que je joue avec ma proie dont les yeux me font parfois me demander si je suis le chasseur ou le chassé, Marion et moi essayons plusieurs fois d'inclure dans le groupe tous les mecs qui passent à portée, pour elle comme pour moi dans le but évident d'obtenir un quatuor pour la pauvre Juliana qui ne connaissait personne plus que moi au début de la soirée et qui ne sembla pas fichue de socialiser.
Sans succès.
Progressivement, je rapproche mon corps de celle qui m'intéresse et lui accorde la totalité de mon attention ; plus je la délaisse, plus Juliana s'acharne à parler plus vite que sa copine et à s'immiscer dans notre connexion. Il y avait longtemps que je n'avais pas vu une telle obstination, et qu'elle soit dirigée sur moi en cet instant m'emmerdait profondément.
Je pense que nous devions, vu de l'extérieur, offrir un magnifique cas d'école à qui aurait voulu étudier le langage corporel dans les différentes situations de séduction.
Alors que j'envisageais de couper l'une ou l'autre au beau milieu d'une phrase pour prendre ma danseuse par la main et l'emmener à l'écart pour l'isoler, Juliana céda d'un coup. Je suis encore surpris qu'elle ait supporté ce manège aussi longtemps. Il faut croire que certaines personnes préfèrent nier l'évidence plutôt que d'admettre leur ridicule ou leur échec.
Elle abandonna le terrain pour aller s'asseoir sur la première chaise venue.
Deux minutes plus tard, j'embrassais Marion.
Elle avait un baiser d'une sensualité fabuleuse, une façon magnifique de garder sa bouche mi-close pour donner de l'émotion au contact tout en jouant de son corps et de ses mains de telle sorte que j'entrevoyais la sauvagerie presque animale qu'elle faisait pourtant mine de retenir avec délicatesse.
Je m'y adaptai instantanément.
Dans la vie, il n'y a que deux choses qui sont infinies : la féminité, et les moyens d'en abuser.
Nikita (Jeanne Moreau à Anne Parillaud)
[quote]M : Je peux tirer ce noeud, là ? [tire un des lacets noués de sa robe alors que je l'embrasse en plein milieu de tous les autres qui dansent]
E : [plante ses yeux dans les miens] Oui.
Je suis autant séducteur que cette fille est mangeuse d'homme. Une chose est sûre, elle sait jouer. La nuit fut faite de légères escarmouches sensuelles, d'attaques et de replis mutuels, comme deux adversaires valeureux qui se croisent se sentent et se jaugent en s'estimant trop forts pour risquer la destruction commune dans un combat titanesque, restant pourtant à l'affut du moindre signe de faiblesse.
Elle jouait "à domicile", mais j'avais malgré l'inconnu le nombre et le choix pour moi. Je me sentais de toute façon trop insouciant et invincible pour me laisser atteindre par quoi que ce soit.
Beaucoup avaient prévu de dormir sur place, mais je me suis esquivé bien avant la fin de la nuit. Je n'y peux rien, au bout d'une demi-douzaine d'heures, souvent, je me lasse d'une fête. Encore celle-ci était-elle intéressante, mais j'avais de toute façon un rendez-vous de travail le lendemain.
Je me suis fait raccompagner par un homme qui conduisait une Smart coupé, et je l'ai écouté un peu distraitement parler jusqu'au bout de son petit bijou pendant que je pensais au mien, à ma brunette, en relisant les chiffres de son numéro de téléphone.
Andrea
Guy de Maupassant, Le verrou.
Nos existences contiennent du roman autant qu'il nous en faut. Parfois davantage.
Rudyard Kipling
Quand je dis à des gens qui ne me connaissent pas que je considère ma vie comme un roman, et que l'existence de chacun est susceptible d'être une histoire digne d'être écrite, on ne me croit pas toujours.
Pourtant, même les plus casaniers ont une histoire. Qu'elle soit vive ou lente, active ou léthargique, il y a toujours quelque chose à en dire. Il suffit de savoir la raconter.
Hier soir, la mienne m'emmenait en banlieue. Suffisamment loin de Paris pour que je fasse une exception à la règle et que je dédaigne mon journal et mon livre une fois installé dans ma rame, volant un peu de repos au tourbillon d'activité qui me fait virevolter et tourner la tête.
J'étais invité par un copain de longue date, mais pas intime pour un sous. De ces connaissances que l'on rencontre dans les clubs de sport, qui semblent toujours lointaine, et qui durent pourtant plus longtemps, parfois, que de grandes amitiés.
A l'approche du but je commence à me secouer. Il s'agit de ne pas se laisser sombrer dans l'indolence : il y aura une quarantaine de personnes, parmi lesquelles je n'en connaitrai qu'une, et j'ai envie de m'amuser.
Je le retrouve à une gare quelconque, je chasse les songes persistants de ma demi-sieste dans le RER en me mettant à parler à tue-tête dans la voiture, et nous arrivons.
Il ouvre la porte, j'entre à sa suite ; le temps de poser mes pieds sur un carrelage qui fait glisser mes bottines et je croise le regard d'une brune qui sort avec sa copine.
[quote]M : Bonsoir. Ce fut court.
E : [sourire] Mais, je reviens.
La porte se ferme et je commence à saluer ceux qui sont déjà là et à me faire remarquer. J'ai paradoxalement plus de facilité à dégager une énergie anarchique et bordélique quand je suis globalement fatigué. Le cerveau rationnel perd le contrôle, et le calme habituel qui est le mien s'efface devant le Chaos séduisant que chacun porte en soi.
Je la veux. Je m'en fais la remarque tout de suite, Marion est une fille typiquement spikienne (un FR qui me revient en mémoire) comme je n'en rencontre pas beaucoup. Une petite brunette toute fine, à la chevelure coupée en un carré dégradé et délicatement relevée qui laisse apparaître une nuque toute blanche que j'ai envie de mordiller doucement.
Je la veux, et je l'aurai.
D'ailleurs, le terrain est favorable : pour changer, il y a plus de filles que de mecs à cette soirée, prépa médecine et pharma oblige, et certains gars sont déjà officiellement pris (avec des filles présentes, qui plus est).
Résultat, je me sens comme un braconnier qui chasserait la gazelle en pleine savane à la mitrailleuse et avec un hélicoptère : il est littéralement impossible que je manque ma cible, et au pire, j'en tomberai au moins deux ou trois autres au passage sans le faire exprès.
Du reste, ça n'a évidemment pas loupé : avant même qu'elle ne soit revenue, j'en avais déjà une sur le dos. L'euphorie du moment a décidément des effets très agréables, dont le moindre n'est pas de faire entrer dans mon monde tous ceux qui passent à ma portée avec une grande facilité.
Ma mère voici le temps venu
D'aller prier pour mon salut
Mathilde est revenue
Jacques Brel
Je retrouve finalement Marion au détour d'un buffet, et le ballet commence. Le ballet, car nous n'en sommes pas les seuls danseurs : autour de la chorégraphie que forme notre duo qui se suffit très vite à lui même viennent graviter ceux qui ont intérêt à nous gêner. Autrement dit, ceux que nous intéressons.
Tout à mon dialogue fait de folie et de légèreté, que nous possédons autant l'un que l'autre ce soir là, je prends notamment en grippe sa copine.
L'amie de Marion est célibataire, et ça se voit. J'ai commis l'erreur de commencer par séduire le duo en quelques phrases d'accroche insouciantes et joueuses, pour faire naître les étincelles d'intérêt dans les yeux de ma brunette avant de préciser ma volonté et aussi pour amadouer son garde du corps. Mais il s'avère vite que le garde du corps en question qui répond au prénom de Juliana a réagit un peu trop fort à ma bonne humeur et s'est complètement laissée entrainer dans ma séduction.
Pendant de longues dizaines de minutes, alors que je joue avec ma proie dont les yeux me font parfois me demander si je suis le chasseur ou le chassé, Marion et moi essayons plusieurs fois d'inclure dans le groupe tous les mecs qui passent à portée, pour elle comme pour moi dans le but évident d'obtenir un quatuor pour la pauvre Juliana qui ne connaissait personne plus que moi au début de la soirée et qui ne sembla pas fichue de socialiser.
Sans succès.
Progressivement, je rapproche mon corps de celle qui m'intéresse et lui accorde la totalité de mon attention ; plus je la délaisse, plus Juliana s'acharne à parler plus vite que sa copine et à s'immiscer dans notre connexion. Il y avait longtemps que je n'avais pas vu une telle obstination, et qu'elle soit dirigée sur moi en cet instant m'emmerdait profondément.
Je pense que nous devions, vu de l'extérieur, offrir un magnifique cas d'école à qui aurait voulu étudier le langage corporel dans les différentes situations de séduction.
Alors que j'envisageais de couper l'une ou l'autre au beau milieu d'une phrase pour prendre ma danseuse par la main et l'emmener à l'écart pour l'isoler, Juliana céda d'un coup. Je suis encore surpris qu'elle ait supporté ce manège aussi longtemps. Il faut croire que certaines personnes préfèrent nier l'évidence plutôt que d'admettre leur ridicule ou leur échec.
Elle abandonna le terrain pour aller s'asseoir sur la première chaise venue.
Deux minutes plus tard, j'embrassais Marion.
Elle avait un baiser d'une sensualité fabuleuse, une façon magnifique de garder sa bouche mi-close pour donner de l'émotion au contact tout en jouant de son corps et de ses mains de telle sorte que j'entrevoyais la sauvagerie presque animale qu'elle faisait pourtant mine de retenir avec délicatesse.
Je m'y adaptai instantanément.
Dans la vie, il n'y a que deux choses qui sont infinies : la féminité, et les moyens d'en abuser.
Nikita (Jeanne Moreau à Anne Parillaud)
[quote]M : Je peux tirer ce noeud, là ? [tire un des lacets noués de sa robe alors que je l'embrasse en plein milieu de tous les autres qui dansent]
E : [plante ses yeux dans les miens] Oui.
Je suis autant séducteur que cette fille est mangeuse d'homme. Une chose est sûre, elle sait jouer. La nuit fut faite de légères escarmouches sensuelles, d'attaques et de replis mutuels, comme deux adversaires valeureux qui se croisent se sentent et se jaugent en s'estimant trop forts pour risquer la destruction commune dans un combat titanesque, restant pourtant à l'affut du moindre signe de faiblesse.
Elle jouait "à domicile", mais j'avais malgré l'inconnu le nombre et le choix pour moi. Je me sentais de toute façon trop insouciant et invincible pour me laisser atteindre par quoi que ce soit.
Beaucoup avaient prévu de dormir sur place, mais je me suis esquivé bien avant la fin de la nuit. Je n'y peux rien, au bout d'une demi-douzaine d'heures, souvent, je me lasse d'une fête. Encore celle-ci était-elle intéressante, mais j'avais de toute façon un rendez-vous de travail le lendemain.
Je me suis fait raccompagner par un homme qui conduisait une Smart coupé, et je l'ai écouté un peu distraitement parler jusqu'au bout de son petit bijou pendant que je pensais au mien, à ma brunette, en relisant les chiffres de son numéro de téléphone.
Andrea