Les films que vous avez vus, à travers le filtre de la séduction, du lifestyle, et du look

Modérateurs: animal, Léo

By liobail
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Synopsis :

Cloclo, c’est le destin tragique d’une icône de la chanson française décédée à l’âge de 39 ans, qui plus de trente ans après sa disparition continue de fasciner. Star adulée et business man, bête de scène et pro du marketing avant l’heure, machine à tubes et patron de presse, mais aussi père de famille et homme à femmes…
Cloclo ou le portrait d’un homme complexe, multiple ; toujours pressé, profondément moderne et prêt à tout pour se faire aimer. (source: Allociné)


Mon avis :

Ce film est extrêmement intéressant du point de vue du développement personnel. Que l'on s'intéresse à Claude François et sa musique n'a finalement pas vraiment d'importance, ce pourrait être un film sur un athlète ou un homme politique, ce serait pareil.
Si l'expression "triomphe de la volonté" n'avait pas servi à Léni Riefenstahl pour son film sur le nazisme, je l'aurai employée pour parler de "Cloclo".

La volonté de Claude François à devenir célèbre est hallucinante. Alors que son père le veut banquier, il s'improvise batteur à Monaco (à l'audace, toujours à l'audace) pour commencer à mettre des sous de côté.
Je rappelle Stéphane qui citait Sun Tzu dans son "Art de la guerre":
[quote]Celui qui n'a pas d'objectifs ne risque pas de les atteindre.
A 21ans il monte à Paris. Il doit déjà savoir que rien ne pourra l'empêcher d'être le "number one".

Trois chose me marquent chez lui: la volonté bien-sûr, le travail et le feeling.
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Attention "spoiler" (vive la langue française...), ne lisez pas si vous comptez le voir [/size]

la volonté

je le disais, le jeune Cloclo monte à Paris, il est le seul de la famille à commencer à se faire de l'argent quand pas un kopeck ne rentre. Il prend des cours de danse, il s'épile les sourcils, il range gentiment ses billets sous son lit, il se refait le nez ("chaque détail compte", il était sans doute son propre coach relooking :wink: ).
Au cabaret il demande rapidement à chanter, puis il va voir les imprésario. Rien ne le déroute, le doute n'a pas sa place, il y retourne, ça passe au forcing.
La volonté toujours, quand il s'impose chez la parolière Vline Buggy (toujours l'audace !!) pour écrire "Belles belles belles". Il quitte sa première maison de disque pour ne pas rester l'ombre de Johnny Hallyday.

Le travail

La volonté sans le travail ça ne mène nulle part.
Et Claude semble être un sacré bosseur. Il travaille sa batterie dans sa chambre, il travaille ses compos, et l'acteur Jérémie Rénier à beaucoup bossé lui-aussi pour parvenir à être aussi crédible. Cours de chant, cours de danse, muscu, gym, visionnage de kilomètres d'archive...
Claude François travaille son image: le nez, les vêtements, ce style androgyne très particulier, son image, son image et toujours son image (les fameuses lunettes de soleil, Wong Kar-Wai ou Philippe Manoeuvre n'ont rien inventé !).
Il est d'une rigueur extrême, qui devient excessive: les assistants doivent être irréprochables, ceux qui bossent avec lui doivent tenir le rythme.
Remarquez le magnifique plan séquence où il sort de chez lui avec son dictaphone: il bouillonne d'idées et ne veut pas en perdre une miette. Dans sa voiture les filles courent autour de lui, il fait l'effort de paraître disponible, il retient même certains prénoms: que du travail.

Le feeling, l'intuition et la capacité d'assimilation


"L'homme préféré des filles de moins de 10 ans" comme l'appelait Libération le lendemain de sa mort était un business-man bien plus qu'un artiste. Donc un séducteur.
Et pour séduire il faut sortir de sa zone de confort (j'espère que vous le saviez déjà !), se remettre en question, ne pas oublier qu'on ne finira jamais d'apprendre.
Quand l'imprésario lui mets une veste, il va voir Johnny. Lui il twiste, et aucune fille ne reste assise, c'est physique, les chaises volent et ça hurle. Cloclo regarde, il observe, rien ne lui échappe. Il intègre la danse, le rythme, l'esprit. Il sort de la salle, il pense déjà à ce qu'il va composer (finalement ça marchera pas, normal c'est une bouse, mais tout le reste aussi alors qu'il finira par y arriver).
Quand il tourne bien, que les filles tombent dans les pommes et pleurent, l'hystérie tous les soirs, son agent Paul Lederman (Benoit Magimel dans le film, ri-di-cule !) le tire de cette nouvelle zone de confort :"continue comme ça, dans 6 mois t'es foutu, oublié, c'est fini pour toi".
No problemo, Cloclo s'intéresse aux nouveaux sons, il va voir Otis Redding (belle scène de concert, des danseuses blacks à croquer toutes crues !), et à nouveau il intègre tout, les pas, le son, l'image, et boum c'est reparti, au passage un peu plus de paillettes, et des Claudettes en nano-jupe.
Puis la mode passe au disco, no soucis, c'est "Magnolia forever".

Le feeling toujours quand il prends soin de bien s'entourer. Qu'on le veuille ou non, l'enfer c'est les autres: on est façonné par les gens qu'on fréquente ou avec qui on travaille, alors n'oubliez jamais d'accorder beaucoup d'importance à sélectionner les personnes à qui vous consacrez votre temps.
Quand Claude François doute dans sa loge, dans le creux de la vague, il réalise peut-être que les loups et les profiteurs ne sont pas loin (son guitariste lui sourit, il continue à l'aimer tant que tout va bien).


Mais le monsieur n'est pas parfait, loin de là, il reste humain (qui l'avait oublié après ces éloges ?).

Sa première femme veut se barrer (faut dire que personne n'aimerait rester enfermé chez soi), voilà le blondin misérable et pathétique ("mais je t'aime moi !", il pleure au téléphone). On est pas loin du mépris de Moravia.

Je m'étendrais pas sur sa terrible dépendance affective, les filles (toujours plus jeune ? toujours admiratives ? toujours acquises ?) qu'il enchaîne pour se sentir aimé.

[size=150]Alors pour résumer:[/size]

"Cloclo" est un très bon film, il fait réfléchir aux facultés nécessaires si l'on veut devenir séduisant: de la volonté, du travail et de l'intuition.
Et au-delà, Claude François était un personnage complexe, ambivalent, intéressant, antipathique par certains d'aspects mais précurseur absolu dans le show-business. Il avait une longueur d'avance, et par cet article j'ai essayé d'expliquer pourquoi.
Je souligne la performance absolument bluffante de Jérémie Rénier (aperçu dans "Bons baisers de Bruges", excellent film au comique triste, et dans "Dikkenek", film survolté avec François Damien), j'espère qu'il ira loin, il le mérite.

Je remercie john dilinger de m'avoir montré comment faire un compte-rendu clair et convaincant: après avoir lu ton post hier j'ai immédiatement regardé "The King's Speech". C'est en étant bien conseillé que l'on avance mieux.