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Modérateurs: animal, Léo

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By noonan
#126159 Des soirées, j’en ai vécu des mythiques. Des bien nazes aussi. Et entre celles-ci, tout un tas d’autres plus ou moins réussies qui font la chair de la vie nocturne.

Très rares sont celles, cependant, desquelles j'ai retiré des vérités utiles.

Ou quand Picsou se mêle à un triangle incestueux...


Samedi, 21 h 30

Richard et moi nous sommes rencontrés sur les bancs de la fac d’Histoire.
Huit ans plus tard, Richard et moi cheminons jusqu’à un meeting de slam organisé par un ami dans un de ces bars associatifs underground qui pullulent dans le centre de Bordeaux.

De ce début de soirée, pas grand-chose à dire. Quelques artistes dépressifs déclamant en vers en quoi la vie les a brisés, le tout en boucle et de façon inaudible. Dix minutes auront suffies à nous faire dégager.

Quelques centaines de mètres plus loin, la Maison à Réaction. Musique funk et pierres de taille. L’endroit est bondé, et la population dispose d’un niveau d’énergie autrement plus élevé. Notre attention se porte sur un groupe composé de trois filles et un garçon, parmi lesquels deux blondes visiblement originaires de l’Est. A moins que ce ne soit du Nord. Deux cibles au contact visuel fuyant, et au niveau d’intérêt par-là même difficilement quantifiable.

Après quelques tergiversations, Richard se jette à l’eau. Je le suis de près, et nous faisons ainsi connaissance avec Inge et Line, deux sœurs allemandes – l’une professeur ici même, l’autre en visite pour la semaine - ainsi que leurs amis espagnols qui ne tarderont pas à prendre la poudre d'escampette.

Nous badinons du mieux possible, ramant comme il est nécessaire de ramer pour créer une dynamique de groupe propice aux interactions. La sauce prend, mais le niveau de la musique, couplé à la mixité des accents, ne favorise pas le dialogue.

Au premier blanc, rapide debrief’. Richard veut Line, la cadette, la plus délurée. Monsieur a pris l’initiative de l’abordage, Monsieur est donc prioritaire. Mais je ne perds que peu au change, Inge, dans un style plus propret, est tout aussi mignonne.

Décision est prise des les inviter à danser.

Le premier écueil se profile.
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By noonan
#126170 « Quand on dit non, c’est non. »
Voilà peut-être la croyance limitante la plus coriace héritée de mes parents.

Aussi, quand Inge me fait signe qu’elle ne veut pas danser, je sens le regard lourd de ma mère quelque part dans mon dos. Mais j’ai depuis croisé quelques personnes, ici et ailleurs, qui ont su me faire l’éloge de la persévérance. Aussi sors-je mon plus beau sourire, et après quelques taquineries, ses hanches sont entre mes mains.

A ce moment, je ne connais pas encore son prénom. Je décide donc de mettre en place un jeu de devinettes, ce qui l’amuse assez pour qu’elle se laisse enlacer plus avant.

Les corps s’échauffent. Je tente de l’embrasser une première fois. Elle se retire. On perd pas le sourire et on continue l’escalade physique. Inge se retire une deuxième fois. Ne serait-ce pas mon père qui se trémousse dans l’ombre à l’autre bout de la piste ? A la troisième, ses lèvres sont à moi.

Nous nous séparons à la fin de la chanson et je rejoins Richard. De son côté, la petite sœur est un glaçon. Je connais le gaillard, ce n’est pas un manchot dans le domaine, mais rien à faire. Blasé, et me voyant en bonne compagnie, il décide de rentrer.

Inge me rejoint. Ca commence à devenir chaud. Très chaud. Je l’isole dans un coin du bar. Jeux de mains, la température devient caniculaire. Je lui propose une première fois de nous rendre à mon appartement, mais elle est réticente à l'idée de laisser seule sa sœur. Et pourquoi ne pas la raccompagner avant de bifurquer pour nous rendre chez moi ? Inge opine. Inge dit oui. Inge dit non. Inge s’éjecte finalement, prétextant aller jeter un œil à sa cadette. Pas de problèmes. J’en profite pour aller remplir mon verre.

A mon retour, spectacle méprisable. Deux crève-la-faim qui tournaient autour d’Inge depuis des lustres sans oser l’aborder, spectateur de mes faits, se disent qu’au final ça ne doit pas être si difficile de l’emballer, et les voilà qui la colle avec l’insistance de gorets en rut. Je la retire à leurs mains moites, et nous voilà tout les trois ; Inge, sa petite et froide sœur Line, et moi. J’ai sur moi un T-shirt à l’effigie de Mortimer, le prototype avorté de Mickey Mouse – un atout de choix pour orienter la discussion sur les souvenirs d'enfance – et un débat houleux éclate pour savoir qui de Donald ou Dagobert/Uncle Scrooge/Picsou est le meilleur des canards. Mais à mesure que le confort s’installe, la tension diminue. Je leur propose donc de retourner danser.

Je ne le savais pas, mais je venais d’ouvrir la porte de la Quatrième Dimension…
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By Léo
#126173 Bravo, c'est une belle rencontre très électrique..

Continue d’écrire parce que c'est fortement captivant !
By Chando
#126178 Très bien écrit et captivant mais...

[quote]Aussi sors-je mon plus beau sourire, et après quelques taquineries, ses hanches sont entre mes mains

Précise, précise !!! qu'as-tu fait pour tourner la situation à ton avantage ? ( je suis persuadé qu'une fois les hanches en main, tu avais gagné la suite...
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By noonan
#126217 [quote="Chando"]Précise, précise !!! qu'as-tu fait pour tourner la situation à ton avantage ? ( je suis persuadé qu'une fois les hanches en main, tu avais gagné la suite...

Trois fois rien...
Quand Inge me fait signe qu'elle refuse de danser avec moi, je lui sors la bouille du gamin triste à laquelle elle répond par un haussement d’épaules, en mode « ça change rien, désolée. », sans se départir pas de son sourire plein de petites dents blanches.
Je me rapproche alors et lui glisse à l’oreille : « Juste une danse. Sois pas timide. » Et sans attendre sa réponse, je lui prends la main et la tire vers moi. Elle résiste. Là, sa main toujours dans la mienne, je feints la sévérité, lève un doigt et répète : « Une danse. » avant d’aussitôt reprendre mon sourire. Enfin elle m’accompagne.
Nous dansons trente secondes sans pratiquement nous toucher, elle est ailleurs. Je lui attrape le menton avec douceur, capte son regard et lâche, mes yeux dans les siens : « C’est ici que ça se passe. » Je glisse ma main sur sa hanche, elle la laisse. La suite, la voilà…



Précédemment :

[quote]Inge, sa petite et froide sœur Line, et moi. J’ai sur moi un T-shirt à l’effigie de Mortimer, le prototype avorté de Mickey Mouse – un atout de choix pour orienter la discussion sur les souvenirs d'enfance – et un débat houleux éclate pour savoir qui de Donald ou Dagobert/Uncle Scrooge/Picsou est le meilleur des canards. Mais à mesure que le confort s’installe, la tension diminue. Je leur propose donc de retourner danser.


Inge marque une baisse de régime et me propose de danser avec sa sœur. Pourquoi pas, me dis-je innocemment. Tu ne perds rien pour attendre, Inge.

Je prends donc Line par la main et la mène jusqu’à la piste, sous les regards attentionnés de son aînée. Mais moi qui pensais que Miss Freeze et moi nous contenterions de nous dandiner à distance raisonnable, j’en ai pris pour ma candeur. La plus jeune des sœurs se déhanche soudain avec la hardiesse d’un démon. Sa main froide se pose sur ma nuque et Line me rapproche d’elle avant de commencer à me caresser le torse sans aucune gêne. Je jette en direction d’Inge un regard où se mêle à la fois amusement et panique, mais je garde contenance. Entre mes bras, Line se retourne. Les mains sont les mêmes, mais les hanches sont différentes. Mon 501 colle à son slim et la jeune fille se met à se frotter avec ardeur contre cette partie de mon anatomie qu’elle ne peut ignorer, surtout à ce moment.

Un groupe de danseurs s’intercale entre nous et Inge. Pour quelques secondes, elle ne nous verra plus. La jeune allemande veut jouer à un jeu dangereux, et bien nous serons deux. Je la fais pivoter, lui épingle le regard et glisse une main le long de sa gorge jusque sur sa poitrine. Line ne bronche pas. Aguerri, mes doigts se faufilent sous son T-shirt humide de sueur et mes paumes dans le creux de ses reins, je l’attire à moi. Sa bouche se rapproche de la mienne.

Arrêt sur image ! Deux choix s’offrent alors à moi : où l’embrasser et faire une croix sur ma to do list à la ligne « Emballer deux sœurs en une soirée », où m’arrêter là et garder une chance de coucher avec Inge.

Ladite Inge choisit pour moi en déboulant entre nous pour nous séparer.

Je ne sais pas exactement ce qu’elle a vu, mais rien d’assez grave pour l’empêcher de remettre le couvert. De nouveau ça chauffe, et pour la deuxième fois, je lui propose de rentrer chez moi. Non... me dit-elle en me tirant par la main pour nous isoler d’elle-même.

Mes mains partent à l’aventure. Inge se renfrogne, puis s’abandonne. L’allemande rougit, sa peau est chaude, elle halète. Au comble de l’excitation – et pour la troisième fois - je l’enjoins à partir. Elle hésite. Voyant qu’elle se met à réfléchir – ce qui fatalement joue en ma défaveur - je lui prends les mains et la tire vers moi.

[quote]Moi - sourire carnassier : Aller, on y va.
Inge : OK, mais je vais prévenir ma sœur.

Cette dernière s’était entre temps trouvé un bellâtre pour lui faire la cour, et lorsque après avoir récupéré mes affaires je les rejoins, je trouve la bande en pleine discussion. Je me présente et glisse mon bras autour des épaules de Inge. Bras qu’elle enlève aussitôt. OK jeune fille, tu veux jouer à ça. Discrètement, je glisse mes doigts sous sa jupe, et ne la trouve pas indifférente.

Ce qui, néanmoins, ne l’empêche pas de parler. Et parler. Et parler…

Je tente par des signes de faire comprendre au bellâtre que s’il a un minimum d’amour pour son prochain, ce serait sympa d’arrêter d’alimenter la discussion, d’autant qu’il a de quoi faire de son côté. Mais il faut croire que l’amour se perd.

Il est 6 heures du matin, j’ai épuisé mes réserves de patience. Je profite d’une virgule, un rien, une respiration pour tourner Inge vers moi :

[quote]M : Bon, j’y vais.
I : Quoi ?! Vraiment ?
M : J’y vais, avec ou sans toi…
I : Je sais pas trop.
M : Tant pis.

Je l’embrasse, me penche vers sa sœur pour lui faire la bise – son regard va de sa sœur à moi en mode What The Fuck ?! – salut le bellâtre et rejoins la sortie.
Je vous mentirais en vous disant que je n’ai pas espéré jusqu’au dernier moment la voir sortir du bar à ma suite, mais ça ne sera pas arrivé.

Alors, tel un cowboy solitaire à l’entrejambe douloureux, je suis rentré chez moi, de par les rues de la Belle Endormie, comme il est de bon ton de surnommer ma ville.

La fierté se paie cher quelque fois…



Mais j’aurais tout de même beaucoup appris ce soir. Sur la persévérance notamment.

Il n’y a pas si longtemps, quand une fille disait ne pas vouloir danser avec moi, je passais mon chemin et retournais faire tapisserie.

Il n’y a pas si longtemps, quand une fille évitait mon baiser, je baissais les bras et me vautrais dans le confort de la friendzone.
Non, en fait je vous mens… Il n’y a pas si longtemps je n’aurais même pas tenté un baiser, par peur justement de ce Non qui chez moi sonnait comme une sentence irrévocable.

J’ai comme l’impression que cette soirée fait parti de ces petits déclics qui vous font comprendre deux trois choses sur la vie.

Un Non peut cacher tout un monde de possibilités, et si une béquille est le prix à payer pour cette prise de conscience, ça reste une bonne affaire…
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By Stan
#126226 C'est dans l'échec qu'on apprend, il ouvre à la voie à des discussions, à des remises en question, certains gomment les croyances limitantes.

Je me rappelle de cette fille, rencontrée à Barçelone sur la Rambla, elle était avec sa copine. Il est 6h du mat', je suis crevé et en plus j'avais déjà baisé la veille — après une nuit blanche.

Pensant que je la reverrai pour sûr, je me suis permis le luxe de lui dire « je prends ton FB on s'organise un truc demain ». Total, elle m'a accepté 2 jours après ; j'étais déjà rentré, et je ne la reverrai jamais. De cet échec, j'en ai tiré plein de conclusions dont la plus importante restera sans doute qu'il faut nécessairement « consommer » directement, sans remettre au lendemain.

Autrement, je suis complètement fan de ton style d'écriture noonan.
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By noonan
#126227 [quote="Stan"]De cet échec, j'en ai tiré plein de conclusions dont la plus importante restera sans doute qu'il faut nécessairement « consommer » directement, sans remettre au lendemain.

D'où mon insistance à la ramener chez moi. :twisted:

Elle m'a bien proposé dans la négociation de me donner son numéro pour qu'on se revoit la semaine d'après, mais ça sentait l'échappatoire fumeuse. Vu le caractère indécis de mon allemande, et le niveau de la connexion, c'était ce soir ou jamais.

Dingue comme les interactions avec les nanas m'apparaissent de plus en plus comme un jeu de poker menteur, où la notion de risk and reward est essentielle à gérer.
By john dilinger
#126241 [quote]Je profite d’une virgule, un rien, une respiration
Magnifique.
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By Augustin
#126291 Belle plume et belle histoire.

Il est important ce moment où "tu aurais pu" et que tu déclines. Au moins autant que le moment où tu te rends compte que le "non" est un vaste champ des possibles.

Une soirée riche en découvertes :wink:
By Chando
#126295 Pour moi, il n'y a aucun échec là-dedans...la grande soeur ne savait tout simplement pas quoi faire de la petite, les parents avaient dû fortement la sermonner à ce sujet, et il était impensable qu'elle aille prendre du bon temps avec un französe en abandonnant mini-teutonne au premier bellâtre venu...

Très très bien joué....

Quant à ton style, il me rappelle furieusement les coquineries les plus amusantes de Pierre Louÿs, ce qui n'est pas peu dire...Bravo ! et surtout...Encore !
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By Augustin
#126342 [quote="noonan"]Un Non peut cacher tout un monde de possibilités, et si une béquille est le prix à payer pour cette prise de conscience, ça reste une bonne affaire…

Si il y a bien une leçon importante dans l'apprentissage, c'est celle-ci.

(et qu'il faut faire attention aux jeans slim :mrgreen:)