- Mer Juil 30, 2014 10:04 pm
#156091
[quote="S.Mimura"][quote="Stan"]Tu es passé à côté de l'essentiel du reportage Maurice, c'est bien dommage.
[quote]Le génie du capitalisme, c'est d'arriver, pour pallier au manque sexuel et affectif — que la famille permet —, une gigantesque industrie de l'amour qui va justement venir se substituer à la famille.
Ça sonne quand même un peu comme un raccourci fantasmatique.
C'est surtout que dit comme cela sans développer un minimum, ça tombe un peu comme un caillou tellurique d'origine extraterrestre qui apparaît sur la Terre, c'est un peu trop incongru.
Tentons de donner la fameuse explication:
Au temps du "mariage jusqu'à la mort+ mise en famille obligatoires", les manques affectifs et sexuels n'existaient quasiment pas et les adultes étaient majoritairement "heureux" avec guillemets dans le sens où il n'y avait cette quête actuelle et effrénée du bonheur pour être heureux, on laissait cela aux Emma Bovary et Anna Karenina. Dans ce domaine, ils se contentaient largement de leur sort. Les gens heureux n'ont pas d'histoire et surtout ils ne consomment pas et c'est encore pire pour ceux qui se contentent de leur sort.
En termes de consommation, au crépuscule des Trente Glorieuses, se produit un tournant dans l'économie dans le sens où la consommation de masse tombe dans un écueil: La majorité des ménages sont suffisamment équipés. Les nombreux besoins qui existaient à l'après-guerre ont été pourvus grâce à la hausse du niveau de vie. Par conséquent, il faut entretenir le désir auprès des gens en changeant de modèle et le modèle social de "mariage jusqu'à la mort+ mise en famille obligatoires" est loin de pouvoir remplir cet objectif.
Avec la plus fortuite des simultanéités, s'est produit une révolution de mœurs s'inscrivant parfois dans les lois qui a brisé peu à peu le modèle précédent, ce qui a fait explosé le nombre de célibataires qui sont beaucoup plus à même (de ressentir en permanence le désir) de consommer plus frénétiquement. Il suffit de faire un constat assez simple :Un couple quand il forme un ménage c'est un canapé, une machine à laver, une télévision, une cuisine tandis qu'avec deux célibataires formant deux ménages distincts on a deux canapés, deux machines à laver, deux télévisions, deux cuisines.
De plus, nos deux célibataires sont beaucoup plus susceptibles de subir des manques sexuels et affectifs ce qui produit de la frustration (qui soit dit en passant constitue le moteur de la consommation!). Posé comme ceci, les gens auraient rejeté le nouveau modèle, c'est là qu'intervient le bonheur, la promesse d'un idéal à rechercher à tout prix. C'est cette promesse qui a permis l'adhésion à ce nouveau modèle (ainsi que la diabolisation de l'ancien) à laquelle le capitalisme hurle à qui veut l'entendre à travers la publicité que cette promesse se fera en passant par lui c'est-à-dire par la consommation. Du coup, de manière analogue, pour ce qui est de relations hommes/femmes, s'est créée l'industrie de l'amour, moyen pour lequel le capitalisme fait comprendre que c'est par lui que passera la quête du bonheur dans ce domaine.