- Mer Juin 04, 2008 8:56 am
#50422
En parlant du sourire, je voudrais vous faire partager cette extrait fabuleux qui m'a ouvert les yeux. D'ailleurs il a aussi ouvert mon sourire et mon coeur à l'autre. Il m'a beaucoup parlé car il s'inscrit dans le chemin de l'unité c'est à dire du bonheur, la séparation menant à la souffrance.
[quote]Le sourire, c’est une manifestation symbolique d’accueil positif de l’autre. Sourire, c’est accepter l’humanité de l’autre. La pédagogie, c’est d’abord une démarche qui consiste à reconnaître l’autre comme une personne à part entière. Le sourire, qui est un sourire de cordialité humaine, ne doit pas devenir un sourire de séduction narcissique. Et dans l’éducation artistique c’est important, puisqu’elle touche à toute personne. Elle touche à mon corps, à ma sensibilité, à mon imagination, à mon intelligence, à tout moi. Si quelqu’un me sourit et que son sourire est une demande d’amour, je suis piégé, c’est le sourire de la séduction. Ne jamais oublier l’éthymologie, c’est construit comme cela, vous avez d’abord « se » à l’écart de en latin, « duction », droit, aller droit. Séduire, c’est mettre quelqu’un à l’écart de son chemin propre, c’est le détourner de son droit chemin, la séduction est un exercice de prise d’otage. Le sourire de la cordialité, c’est le sourire que j’offre à l’humanité dans tout être humain. Il y a une différence entre cordialité chaleureuse et l’implication affective. Il ne faut pas se tromper de sourire. Si je souris qu’à ceux qui me sont sympathiques, et que je fais la tête à ceux qui me sont antipathiques, ça va donner quoi? Cela veut dire que pour moi, la clef de la relation, c’est l’affectivité et pas l’objectif que j’ai. Donc, je me trompe de situation. Je ne suis pas là pour aimer certains enfants, et je ne suis pas là pour me faire aimer de mon public. Par conséquent, le sourire de la cordialité est un sourire général, générique et généreux envers tout le monde. Par contre, le sourire narcissique, le sourire séducteur est un sourire sélectif, donc un sourire qui exclut. Et la pédagogie n’a pas vocation à exclure, elle a vocation à faire réussir, à promouvoir la personne. Le sourire qui m’est demandé, ce n’est pas mon sourire à moi, comme individu, mais mon sourire humain. Le sourire de l’humanité qui ne trahit pas les préférences de l’individualité. Et c’est plus facile à dire qu’à faire. Il y a des gens à qui on a envie de sourire et d’autres non. C’est le sourire qui veut dire, « tu es le bienvenu ici."
Extraits d'une conférence de Gérard Guillot, philosophe de l'éducation, CND Lyon avril 1998