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Modérateurs: animal, Léo

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By Maurice
#154517 [img]http://elcaminoacasa.files.wordpress.com/2010/08/libro-playa1.jpg[/img]

Et c'est reparti pour une nouvelle saison littéraire. Pour ma part, ma liste reste inchangée ayant eu les yeux plus gros que mon temps disponible pour lire. Cependant, j'élimine le livre sur Heidegger pour cause d'allergie estivale et je le remplace par un petit Mishima qui trainait chez moi depuis 20 ans sans l'avoir encore lu au titre tout à fait de circonstance.

Louis Pauwels & Jacques Bergier : Le Matin des Magiciens. +500 pages
Paul Bourget : Mensonges
Jean Aicard : L'Illustre Maurin
Friedriech Nietzsche : Fragments automne 1887-mars 1888
Dino Buzzati : Le K
Aristote : Ethique à Nicomaque
Mario Puzzo : Omerta
Régine Desforges : La Bicyclette bleue. +400 pages
Laurant Deutsch : Métronome
Daphné Du Maurier : La Maison sur le rivage
Honoré de Balzac : La Recherche de l'Absolu
Frantz-Funck-Brentano : Les Brigands
Louis-Ferdinand Céline : L'Ecole des cadavres
Frédéric Beigbeder : Au secours pardon. + 300 pages
Aldous Huxley : Le Meilleur des mondes
Henry de Montherlant : Le Songe
Alberto Moravia : Le Mépris
Ray Bradbury : Farenheit 451
Antonio Attini : Borghi e Paesi d'Italia (en italien).
Alain : Propos sur le bonheur.
Sully Prudhomme : Journal intime
John Le Carré : The spy who came in from the cold (en anglais) + 200 pages
Machiavel : Le Prince
René Boylesve : La leçon d'amour dans un parc.
Théodore de Bainville : Petite histoire de France
Yukio Mishima : Le Soleil et l'acier.
Jocho Yamamoto : Hagakure + 100 pages.
DVD théâtre : Georges Feydeau : Un fil à la patte

***

Je commence ma nouvelle saison par le livre de Paul Bourget : Mensonges, dans ce qui semble être sa première édition de 1883 (chez Alphonse Lemerre, grande maison du XIXème, éditeur notamment du groupe poétique du Parnasse - j'avoue que j'aime ces vieux livres, même si mon livre n'est pas à proprement parler en excellent état). Je poursuis ainsi mon exploration littéraire de la Réaction (face au naturalisme, puis face au surréalisme puis face à l'existentialisme et au Nouveau Roman), auteurs oubliés ou relégués, certains manifestement à juste titre (ce que j'ai lu de Barrès ne m'a par exemple pas convaincu l'hiver dernier), d'autres méritant plus qu'un coup d'oeil (La Leçon d'amour dans un parc est tout de même un conte bien intéressant)

Avec Paul Bourget, on est chez un monstre littéraire de la Belle époque, un auteur de salon extrêmement influent.

[img]http://wpcontent.answcdn.com/wikipedia/commons/thumb/f/fe/Paul_Bourget_7.jpg/220px-Paul_Bourget_7.jpg[/img]

Voici ce qu'en dit Wikipédia :

[quote]Paul Bourget, né à Amiens le 2 septembre 1852 et mort à Paris le 25 décembre 1935, est un écrivain et essayiste catholique français issu d’une famille originaire d’Ardèche.

Ayant donné le signal d’une réaction contre le naturalisme en littérature, Bourget est d’abord tenté par le roman d’analyse expérimental. La finesse de ses études de mœurs et de caractères séduit le public mondain qu’il fréquente dans les salons parisiens de la Troisième République. Ses premiers romans – Cruelle énigme (1885), Un crime d'amour (1886) et Mensonges (1887) – ont ainsi un grand retentissement auprès d’une jeune génération en quête de rêve de modernité.

Le romancier change ensuite de direction et s’oriente à partir du roman Le Disciple (1889), considéré comme son œuvre majeure, vers le « roman à thèse », c’est-à-dire le roman d'idées. Il ne se contente plus de l’analyse des mœurs mais en dévoile les origines et les causes, soumises à des lois inéluctables et dont la transgression amène tous les désordres individuels et sociaux. Cette nouvelle voie conduit Paul Bourget à écrire des romans davantage psychologiques : L’Étape (1902), Un divorce (1904) et Le Démon de midi (1914). Il est alors influencé dans son engagement littéraire et dans son orientation romanesque par sa conversion au catholicisme et tente une synthèse entre la science et la foi. L’écrivain est amené à appliquer son talent de romancier psychologue et moraliste aux problèmes sociaux, politiques et religieux de son temps de ce début de XXe siècle.

Son œuvre multiple comprend aussi des poèmes de jeunesse, des essais et quelques pièces de théâtre. L’engagement politique de Paul Bourget même s’il reste souvent cantonné à l’expression littéraire s’est cependant manifesté au sein de mouvements militants et les nombreuses prises de position du romancier traditionaliste, catholique et antidreyfusard en faveur de la monarchie brouillent la lecture de son œuvre, aujourd’hui incomprise voire méprisée et tombée dans l’oubli

Voici le début de Mensonges.

[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f13.highres[/img]
[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f14.highres[/img]

Vous voulez continuer ? Vous pouvez aller ici :
[url]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f15.image[/url]

Je dois cependant préciser qu'arrivé à la page 30, je ne suis pas encore convaincu par l'intérêt de ce livre, en dépit de passages charmants. On sent que Proust a lu ça et l'a complètement transfiguré et comme j'ai lu Proust, j'ai pour le moment l'impression d'avoir affaire à une sorte de brouillon de la Recherche, avec un souci du détail mais en se demandant tout de même où l'auteur veut bien en venir avec tout ça.
By Colin06
#154521 [quote="Maurice"]
Louis Pauwels & Jacques Bergier : Le Matin des Magiciens. +500 pages
Paul Bourget : Mensonges
Jean Aicard : L'Illustre Maurin
Friedriech Nietzsche : Fragments automne 1887-mars 1888
Dino Buzzati : Le K
Aristote : Ethique à Nicomaque
Mario Puzzo : Omerta
Régine Desforges : La Bicyclette bleue. +400 pages
Laurant Deutsch : Métronome
Daphné Du Maurier : La Maison sur le rivage
Honoré de Balzac : La Recherche de l'Absolu
Frantz-Funck-Brentano : Les Brigands
Louis-Ferdinand Céline : L'Ecole des cadavres
Frédéric Beigbeder : Au secours pardon. + 300 pages
Aldous Huxley : Le Meilleur des mondes
Henry de Montherlant : Le Songe
Alberto Moravia : Le Mépris
Ray Bradbury : Farenheit 451
Antonio Attini : Borghi e Paesi d'Italia (en italien).
Alain : Propos sur le bonheur.
Sully Prudhomme : Journal intime
John Le Carré : The spy who came in from the cold (en anglais) + 200 pages
Machiavel : Le Prince
René Boylesve : La leçon d'amour dans un parc.
Théodore de Bainville : Petite histoire de France
Yukio Mishima : Le Soleil et l'acier.
Jocho Yamamoto : Hagakure + 100 pages.
DVD théâtre : Georges Feydeau : Un fil à la patte

***



Comme souvent, une liste foisonnante !

Je n'ai lu "que" le meilleur des mondes, un classique, assez facile à lire mais à mon sens incontournable. Des thèmes forts sur la disparition de la société "traditionnelle", le clonage et la génétique, le "bonheur infini" etc, etc...

Pour le reste, je suis surpris de voir Deutsch, mais pourquoi pas. Balzac ne me tenterait pas (A cause du père Goriot, et de ses cents premières pages imbuvables).

Montherlant, je connais la Reine Morte, j'avais bien aimé.

John le Carré, il me semble qu'il s'agit généralement de policier/thriller, donc plus pour se divertir et lire une histoire bien écrite.

Merci pour ton partage !
By Colin06
#154522 "Le monde est stable, à présent. Les gens sont heureux ; ils obtiennent ce qu'ils veulent, ils ne veulent jamais ce qu'ils ne peuvent obtenir. Ils sont à l'aise ; ils sont en sécurité ; ils ne sont jamais malades ; ils n'ont pas peur de la mort ; ils sont dans une sereine ignorance des passions et de la vieillesse ; ils ne sont encombrés de nuls pères ni mères ; ils n'ont pas d'épouses, pas d'enfants, pas d'amants, au sujet desquels ils pourraient éprouver des émotions violentes ; ils sont conditionnés de telle sorte que, pratiquement, ils ne peuvent s'empêcher de se conduire comme ils le doivent. Et si par hasard quelque chose allait de travers, il y a le soma."

"Et il y a toujours le "soma" pour calmer votre colère, pour vous réconcilier avec vos ennemis, pour vous rendre patient et vous aider à supporter les ennuis. Autrefois, on ne pouvait accomplir ces choses-là qu'en faisant un gros effort et après des années d'entraînement moral pénible. A présent, on avale deux ou trois comprimés d'un demi-gramme, et voilà. Tout le monde peut être vertueux, à présent. On peut porter sur soi, en flacon, au moins la moitié de sa moralité. Le christianisme sans larmes, voilà ce qu'est le "soma"

Le meilleur des mondes - A Huxley
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By Maurice
#154584 Mes listes sont volontairement éclectiques. A ne lire que des choses géniales, on ne se rend plus compte du goût que peut avoir le génie...

Huxley, c'est une relecture depuis le lycée. Je ne vais d'ailleurs pas m'arrêter à ce livre dans mon exploration de son oeuvre - à long terme. Ca m'intéresse de relire le Meilleur des mondes avec des yeux d'adulte. Dans mes souvenirs, Huxley crée un monde totalitaire où Marx et Ford sont réconciliés. Et justement, l'ironie de notre situation, c'est qu'on en est arrivé à une gauche et à une droite qui mêlent ultra-libéralisme et prestations de compensations (dite politique sociale) dans un consensus ultra mou qui nie le broyage des êtres dans une situation générale de totalitarisme mou qui ne dit pas son nom et qui relève tout de même de l'absurde et du grotesque et engendre des situations totalement ubuesques (dernier exemple : cette idée de ne plus noter les élèves).

J'adore les 100 premières pages du Père Goriot qui sont du grand art, comme tout le roman. J'aime comment Balzac prend par la main son lecteur et nous dit : "regardez, écoutez, sentez..."

John Le Carré, c'est pour lire un peu d'anglais, bien que d'un côté je devienne terriblement globishophobe (j'écoutais les gens parler anglais dans une entreprise internationale, un massacre généralisé, et ensuite ils sont très fiers de parsemer leur français de mots anglais... comme ils sont ridicules à la fois en anglais et en français !), j'éprouve maintenant l'envie de lire en VO. Mais je ne souhaitais pas commencer par quelque chose de trop difficile, alors je me suis dit que peut-être ça n'allait pas être trop dur de lire du Le Carré. On verra.

Du côté de chez Bourget, ça s'anime un peu, après une introduction d'une quarantaine de pages relativement assommantes. La preuve :

[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f50.highres[/img]
By goldfish
#154585 Maurice,
Je prends rarement la parole sur le forum. Je vais donc commencer par féliciter l’ensemble de tes posts sur la littérature qui sont toujours très enrichissant.

Une fois de plus cette liste donne le vertige…

Je ne commente pas les livres que j’ai lu pour ne pas gâcher tes futures lectures (ouf il y en a quelques uns…) A la vue du Métronome de Laurant Deutsch je t’invite vivement d’ajouter Paris : Quinze promenades sociologiques des Pinçon-Charlot en complement.
Il y a même une promenade sur le boulevard Richard-Lenoir.

C'est de loin un des meilleurs livres que j'ai lu sur Paris hors romans.
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By Maurice
#154777 Merci Goldfish,

c'est juste la liste du printemps moins quelques ouvrages + 2 (et d'ailleurs, j'ai oublié d'en retirer un déjà lu)... La liste est jolie, mais j'ai comme dans l'idée que tout ne sera pas lu dans trois mois.

Je note tes 15 promenades... ;).

Ce Paul Bourget ne cesse de me surprendre, c'est un diésel, un peu lent au démarrage (mais maintenant, je comprends où il voulait en venir et pourquoi il avait besoin d'établir une telle galerie de personnages), mais là, quel bonheur !

C'est du réalisme non naturaliste, ce réalisme de la "vie intérieure" qui aboutira à Proust. Sauf qu'on a une telle finesse dans le rendu des impressions (j'emploie ce mot à dessein) et des sentiments, ainsi que dans leur analyse, qu'on se trouve face à quelque chose de vraiment très intéressant. Ce qui est très fort - bien que cette méthode sera décriée ensuite par ceux qui s'opposeront à Mauriac notamment - c'est qu'il arrive véritablement à rendre compte de la "vie intérieure" de multiples personnages, y compris des personnages féminins. Autrement dit, les amateurs de la partie "séduction" du forum, risque d'être peu dépaysés, en fin de compte.

Ici, où l'on passe d'une femme à l'autre, de deux mondes différents... brillant(issime). Commencer à "Chapitre VI".

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8 ... 08.highres
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8 ... 09.highres
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8 ... 10.highres

Le reste est à l'avenant... Comment peut-on faire lire du Maupassant au lieu de ça ? Comment ne pas se rendre compte que Proust - qu'il connaissait - lui doit beaucoup (car cette comtesse fait furieusement penser à Odette Swann, même si les deux ne sont pas de même extraction, apparemment du moins) ?

[img]http://static.livre-rare-book.com/pictures/AMB/1778_4.jpg[/img]
1ère édition + cette lettre ci-dessus : 150€.
[url]http://www.livre-rare-book.com/search/current.seam?maximumPrice=0.0&keywords=&firstResult=0&faceted=true&ISBN=&century=ALL&quicksearch=&l=fr&bookType=ALL&reference=&matchTypeList=ALL&author=&title=mensonges++illustrations+de+charles+guillaume++avec+une+lettre+autographe+de+paul+bourget++reliure+signee+l++pouillet&description=&minimumPrice=0.0&sorting=RELEVANCE&minimumYear=0&ageFilter=ALL&keycodes=&maximumYear=0&cid=6820044[/url]
Une lettre manuscrite de Proust : 2000€ et plus...

Si j'avais des sous (je suis ric-rac actuellement), foi en l'humanité et au retour du Goût, je miserais bien là-dessus. Mais comme tout va de mal en pis et que le Moche a encore un brillant avenir devant lui, dans ce nouveau Moyen Âge qui débute, c'est un investissement un peu risqué (demander 100€ et voir ce qui se passe, si vous êtes téméraires :mrgreen: ).
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By Maurice
#154778 Triple flûte, j'ai oublié les balises... revoici donc cet extrait :

[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f108.highres[/img]
[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f109.highres[/img]
[img]http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81087r/f110.highres[/img]
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By Maurice
#154815 On peut penser ce qu'on veut de Gonzague Saint Bris, dont il me semble qu'il est ou a été souvent invité à la télévision - mais comme je n'ai pas la télévision, je le connais peu -, il n'empêche, c'est un remarquable conteur qui sait insuffler la passion dans ce qu'il raconte. On parlait de charisme l'autre jour sur ce site ?

Il vient de rédiger un livre sur George Sand, intitulé En tête à tête avec George Sand et le voici donc invité dans le Libre Journal d'Henry de Lesquen, seconde partie de l'émission, après la chronique économique de 5-10 mn. Thème : Enracinement et libertinage, les deux visages de Georges Sand.

La manière qu'il a de raconter les rencontres de Sand avec Musset et Chopin, nous plonge totalement dans l'époque. Et si la radio aussi pouvait être de la littérature ?

[url]http://www.radiocourtoisie.fr/20459/libre-journal-dhenry-de-lesquen-du-23-juin-2014-les-fractures-de-lafrique-centrale-une-greve-vaincue-par-lopinion-publique-enracinement-et-libertinage-les-deux-visages-de-georges-sand/[/url]

On trouvera ici les futures émissions de radio dans lesquelles il sera invité, sur le même thème (tu m'étonnes, un client pareil, on ne le laisse pas s'échapper !), et comme il ne reste plus beaucoup de temps pour écouter gratuitement l'émission de Radio Courtoisie, on pourra y jeter un coup d'oeil, si l'on juge le thème intéressant.
[url]http://gonzaguesaintbris.over-blog.com/[/url]
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By Maurice
#154817 C'était très amusant d'écouter l'anecdote du médecin vénitien de Musset que G Sand a conquis (euphémisme) devant le patient lui-même. Les 2 intervenants et les 2 intervenantEs n'étant pas d'accord sur l'interprétation qu'il convenait de donner à la chose.

Très intéressant la théorie du moniteur de ski qui suit et donc je vais faire un théorème qui dément totalement le "Rien ne se perd, tout se transforme" de Lavoisier :
"Soit un moniteur de ski sur les pistes enneigées d'un village des Alpes, objet de convoitise de toute une foule de jeunes femelles citadines affamées. Transportez-le dans le métro parisien trois semaines plus tard : il n'est plus que néant."
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By Maurice
#154818 Enfin, j'aurais appris l'expression "Rôtir le balai". Qui la connaissait ?

[url]http://www.expressio.fr/expressions/rotir-le-balai.php[/url]
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By Bertuccio
#154852 [quote="Maurice"]
Le reste est à l'avenant... Comment peut-on faire lire du Maupassant au lieu de ça ?


Parce que Bourget est un écrivain du roman d'analyse, alors que Maupassant est un élève de Flaubert, un écrivain de génie qui avait un style très journalistique (et donc très simple), un nouvelliste très fécond, et un précurseur du registre fantastique assez bien adapté au cinéma.

Et quand bien même ton idée viendrait à la tête des profs, pourquoi faire lire du Bourget à des lycéens qui ne sont même plus capables d'utiliser une citation de V.H pour une dissertation ?
Cela n'aurait aucun sens puisque les jeunes ne voient plus aucun intérêt à lire des livres qui demandent un effort et une certaine sensibilité.

http://fluctuat.premiere.fr/Livres/News ... er-4017820
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By Maurice
#154856 Pour Maupassant, la pique est un peu sévère de ma part, sans doute.

Hypothèses.

Peut-être que la principale considération est plutôt idéologique. Maupassant passe pour un défenseur de la femme opprimée avec son Bel Ami et surtout Une vie. L'enseignement des Lettres en France est aux mains des femmes (et des hommes qui se font mentalement femmes). Cette représentation de la femme comme "victime", c'est en quelque sorte ce qui sauve d'ailleurs Mauriac, le seul écrivain ouvertement de droite toléré au lycée.

Avec Bourget, on est dans une littérature plus masculine : l'analyse est froide, passionnante comme un "phone coaching", par delà bien et mal, et tous, hommes et femmes en prennent pour leur grade ;). Je crois en outre que cet écrivain a été victime de son engagement dans le camp des antidreyfusards - ceci étant, à le lire, du moins pour mes 200 premières pages, bien malin qui pourrait percevoir un quelconque engagement littéraire. La seule pique est contre les antisémites de salon, ceux qui reprennent des idées toutes faites en s'en fichant parfaitement. Je crois d'ailleurs qu'ils sont très nombreux (je parle de ceux qui adoptent des opinions leur permettant de faire carrière).

Ceci étant, de ces 200 premières pages, il y a des vérités sur les femmes que je n'ai lu nulle part ailleurs, et pas non plus chez Proust. Ce serait une littérature pas du tout inutile pour les jeunes hommes - et d'ailleurs la jeunesse de l'époque avait fait un succès de ce livre.

Constat terrible quand on y pense :

[quote]Que de femmes se sont trouvées, comme elle, dans cette situation singulière, d'avoir mis le mensonge le plus complexe au service de leur sincérité, si bien qu'elles doivent continuer leur personnage factice, pour que leurs véritables sentiments obtiennent satisfaction ! Quand les hommes, pour qui ces femmes-là ont eu la tendre hypocrisie de jouer ainsi un rôle, découvrent ce mensonge, ils entrent d'ordinaire dans des indignations et des mépris qui attestent assez combien la vanité fait le fond de presque tous les amours.

Cette phrase aussi, me marque :
[quote]Ce désir que l'ami le plus cher fasse dans son estime une place à part à la femme que nous aimons, lequel de nous ne l'a pas connu à vingt-cinq ans ? Il est aussi fort que l'est à quarante le sage désir de nous cacher d'abord de ce même ami.

*****

Pour Hugo... l'enseignement est tellement formaliste et l'est de plus en plus (c'est pourquoi il est si féminin), tellement ennuyeux, coupé de toute référence chronologique sérieuse depuis qu'un enseignement par l'Histoire de la Littérature a été éliminé petit à petit, depuis au moins les années 1960. Comment peut-on s'étonner du résultat ? Et puis... comment faire aimer Hugo dans des lieux qui ressemblent pour la plupart à des frigos couchés en pleine décharge ?

Pourtant le poème était plutôt simple, d'autant plus que le vocabulaire était sans doue expliqué. Mais l'exercice demandé, formaliste, tellement pénible et vain, que je comprends bien nos lycéens.

Crépuscule

L'étang mystérieux, suaire aux blanches moires,
Frisonne; au fond du bois la clairière apparaît ;
Les arbres sont profonds et les branches sont noires ;
Avez-vous vu Vénus à travers la forêt ?

Avez-vous vu Vénus au sommet des collines ?
Vous qui passez dans l'ombre, êtes-vous des amants ?
Les sentiers bruns sont pleins de blanches mousselines;
L'herbe s'éveille et parle aux sépulcres dormants.

Que dit-il, le brin d'herbe ? et que répond la tombe ?
Aimez, vous qui vivez ! on a froid sous les ifs.
Lèvre, cherche la bouche ! aimez-vous ! la nuit tombe;
Soyez heureux pendant que nous sommes pensifs.

Dieu veut qu'on ait aimé. Vivez ! faites envie,
O couples qui passez sous le vert coudrier.
Tout ce que dans la tombe, en sortant de la vie,
On emporta d'amour, on l'emploie à prier.

Les mortes d'aujourd'hui furent jadis les belles.
Le ver luisant dans l'ombre erre avec son flambeau.
Le vent fait tressaillir, au milieu des javelles,
Le brin d'herbe, et Dieu fait tressaillir le tombeau.

La forme d'un toit noir dessine une chaumière;
On entend dans les prés le pas lourd du faucheur;
L'étoile aux cieux, ainsi qu'une fleur de lumière,
Ouvre et fait rayonner sa splendide fraîcheur.

Aimez-vous ! c'est le mois où les fraises sont mûres.
L'ange du soir rêveur, qui flotte dans les vents,
Mêle, en les emportant sur ses ailes obscures,
Les prières des morts aux baisers des vivants.
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By Monsieur
#154872 Je découvre Oscar Wilde avec un peu de retard et vient d'achever ma lecture du Portrait de Dorian Gray. Ci-dessous, un passage qui m'a beaucoup plu. La version originale est à préférer mais je n'ai trouvé ce passage qu'en version traduite.

[quote]– La bière, la Bible et les sept vertus capitales ont fait notre Angleterre ce qu’elle est.
– Vous n’aimez donc pas votre pays ?
– J’y vis.
– C’est que vous en censurez le meilleur !
– Voudriez-vous que je m’en rapportasse au verdict de l’Europe sur nous ? interrogea-t-il.
– Que dit-elle de nous ?
– Que Tartuffe a émigré en Angleterre et y a ouvert boutique.
– Est-ce de vous, Harry ?
– Je vous le donne.
– Je ne puis m’en servir, c’est trop vrai.
– Vous n’avez rien à craindre ; nos compatriotes ne se reconnaissent jamais dans une description.
– Ils sont pratiques.
– Ils sont plus rusés que pratiques. Quand ils établissent leur grand livre, ils balancent la stupidité par la fortune et le vice par l’hypocrisie.
– Cependant, nous avons fait de grandes choses.
– Les grandes choses nous furent imposées, Gladys.
– Nous en avons porté le fardeau.
– Pas plus loin que le Stock Exchange
Elle secoua la tête.
– Je crois dans la race, s’écria-t-elle.
– Elle représente les survivants de la poussée.
– Elle suit son développement.
– La décadence m’intéresse plus.
– Qu’est-ce que l’Art ? demanda-t-elle.
– Une maladie.
– L’Amour ?
– Une illusion.
– La religion ?
– Une chose qui remplace élégamment la Foi.
– Vous êtes un sceptique.
– Jamais ! Le scepticisme est le commencement de la Foi.
– Qu’êtes-vous ?
– Définir est limiter.
– Donnez-moi un guide.
– Les fils sont brisés. Vous vous perdriez dans le labyrinthe.
– Vous m’égarez... Parlons d’autre chose.
– Notre hôte est un sujet délicieux. Il fut baptisé, il y a des ans, le Prince Charmant.
– Ah ! Ne me faites pas souvenir de cela ! s’écria Dorian Gray.
– Notre hôte est plutôt désagréable ce soir, remarqua avec enjouement la duchesse. Je crois qu’il pense que Monmouth ne m’a épousée, d’après ses principes scientifiques, que comme le meilleur spécimen qu’il a pu trouver du papillon moderne.
– J’espère du moins que l’idée ne lui viendra pas de vous transpercer d’une épingle, duchesse, dit Dorian en souriant.
– Oh ! ma femme de chambre s’en charge... quand je l’ennuie...
– Et comment pouvez-vous l’ennuyer, duchesse ?
– Pour les choses les plus triviales, je vous assure. Ordinairement, parce que j’arrive à neuf heures moins dix et que je lui confie qu’il faut que je sois habillée pour huit heures et demie.
– Quelle erreur de sa part !... Vous devriez la congédier.
– Je n’ose, Mr Gray. Pensez donc, elle m’invente des chapeaux. Vous souvenez-vous de celui que je portais au garden-party de Lady Hilstone ?... Vous ne vous en souvenez pas, je le sais, mais c’est gentil de votre part de faire semblant de vous en souvenir. Eh bien ! il a été fait avec rien ; tous les jolis chapeaux sont faits de rien.
– Comme les bonnes réputations, Gladys, interrompit lord Henry... Chaque effet que vous produisez vous donne un ennemi de plus. Pour être populaire, il faut être médiocre.
– Pas avec les femmes, fit la duchesse hochant la tête, et les femmes gouvernent le monde. Je vous assure que nous ne pouvons supporter les médiocrités. Nous autres femmes, comme on dit, aimons avec nos oreilles comme vous autres hommes, aimez avec vos yeux, si toutefois vous aimez jamais...
– Il me semble que nous ne faisons jamais autre chose, murmura Dorian.
– Ah ! alors, vous n’avez jamais réellement aimé, Mr Gray, répondit la duchesse sur un ton de moquerie triste.
– Ma chère Gladys, s’écria lord Henry, comment pouvez-vous dire cela ? La passion vit par sa répétition et la répétition convertit en art un penchant. D’ailleurs, chaque fois qu’on aime c’est la seule fois qu’on ait jamais aimé. La différence d’objet n’altère pas la sincérité de la passion ; elle l’intensifie simplement. Nous ne pouvons avoir dans la vie au plus qu’une grande expérience, et le secret de la vie est de la reproduire le plus souvent possible.
– Même quand vous fûtes blessé par elle, Harry ? demanda la duchesse après un silence.
– Surtout quand on fut blessé par elle, répondit lord Henry.

A défaut de lire l’œuvre entière, lisez en au moins la fameuse préface :

[quote]The artist is the creator of beautiful things. To reveal art and conceal the artist is art's aim. The critic is he who can translate into another manner or a new material his impression of beautiful things.
The highest as the lowest form of criticism is a mode of autobiography. Those who find ugly meanings in beautiful things are corrupt without being charming. This is a fault.

Those who find beautiful meanings in beautiful things are the cultivated. For these there is hope. They are the elect to whom beautiful things mean only beauty.

There is no such thing as a moral or an immoral book. Books are well written, or badly written. That is all.

The nineteenth century dislike of realism is the rage of Caliban seeing his own face in a glass.

The nineteenth century dislike of romanticism is the rage of Caliban not seeing his own face in a glass. The moral life of man forms part of the subject-matter of the artist, but the morality of art consists in the perfect use of an imperfect medium. No artist desires to prove anything. Even things that are true can be proved. No artist has ethical sympathies. An ethical sympathy in an artist is an unpardonable mannerism of style. No artist is ever morbid. The artist can express everything. Thought and language are to the artist instruments of an art. Vice and virtue are to the artist materials for an art. From the point of view of form, the type of all the arts is the art of the musician. From the point of view of feeling, the actor's craft is the type. All art is at once surface and symbol. Those who go beneath the surface do so at their peril. Those who read the symbol do so at their peril. It is the spectator, and not life, that art really mirrors. Diversity of opinion about a work of art shows that the work is new, complex, and vital. When critics disagree, the artist is in accord with himself. We can forgive a man for making a useful thing as long as he does not admire it. The only excuse for making a useless thing is that one admires it intensely.

All art is quite useless.

Petit bonus : J'ai pris la peine de lui rendre visite :wink:

[url=http://www.hostingpics.net/viewer.php?id=239376P1070595.jpg][img]http://img11.hostingpics.net/pics/239376P1070595.jpg[/img][/url]
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By Bertuccio
#154873 Lecture de la semaine :

[img]http://www.renaud-bray.com/ImagesEditeurs/PG/1042/1042359-gf.jpg[/img]

C'est assez symbolique comme roman.
Alain Fournier est mort il y a presque 100 ans (22 septembre 2014).

J'ai pris l'édition Larousse (celle que je vous présente en photo). Elle est à 3 euros 50 à la Fnac (le prix d'un sandwich).
Donc, même si vous êtes fauché, vous n'avez pas d'excuses.
Prenez vos tartines à midi et passez un samedi à la Fnac pour acheter ce petit roman de 250 pages. C'est un achat qui n'est pas perdu.

La preuve :

[video]https://www.youtube.com/watch?v=bSQRTkFwToc[/video]