- Lun Mai 31, 2010 6:07 pm
#95273
Mon père étant lui-même un psychothérapeute qui envoie du bois, je tenais à réagir à ce thread tant les idées préconçues et le flou artistique semblent reigner en maître dans les esprits. Cela dit, il y a déjà quelques avis éclairés excellents, je vais me contenter d'apporter des précisions pour répondre aux questions suivantes : "qu'est-ce qu'une psychothérapie peut m'apporter ?" et "comment choisir mon psychothérapeute ?".
1 - Qu'est-ce qu'une TCC (thérapie comportementale et cognitive) peut m'apporter ?
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Imaginons que vous souhaitiez participer aux séminaires Spike Seduction, mais que vous n'osiez sortir de chez vous à cause de la peur incontrôlable qu'un objet venu du ciel vous tombe sur la tête et vous tue. Ce fut le cas réel d'une des patientes de mon père, qui sortait à peine de chez elle, paralysée par sa phobie, cela lui pourissait la vie ainsi que celle de sa famille.
Coup de bol, après s'être déplacé 3 fois à son domicile, sa phobie a disparue, après des années de cauchemar. Le lendemain de la dernière séance, son mari appelle mon père, au bord des larmes et plein de gratitude, pour le remercier comme s'il s'agissait d'un miracle. Ils avaient essayé pas mal de pistes auparavant, qui ont laissé le problème intact. Plein de fausse modestie comme il sait l'être lorsqu'il a été très bon, il s'est contenté d'un laconique "Je n'ai fait que mon métier", semblable au pompier qui vient de sauver une petite fille d'un incendie monstrueux.
Ce cas un peu caricatural illustre bien les limites de la raison et le pouvoir de notre inconscient. La totalité de notre être, tout comme l'univers, ne saurait être expliqué intégralement par le prisme de notre raison. Ainsi, vous imaginez combien de fois cette pauvre femme a dû se faire "raisonner" en lui expliquant par A + B que sa peur était sans fondement, elle même en était parfaitement consciente. Seulement, si sa peur était sans fondement
rationnel, on ne pouvait cependant nier son existence.
De la même manière que la musique agit sur notre psyché et laisse les mots impuissants pour expliquer son effet, l'inconscient (disons : la totalité de notre être) dispose de son propre langage qui déborde largement du cadre de la raison. C'est quelque chose de tellement contre-inuititif et dérangeant pour certaines personnes qu'ils ne font pas le rapprochement entre leur thérapie et leur guérison, s'ils sont incapables de l'expliquer.
Un exemple célèbre est celui d'Allen Carr, le type qui a vendu des millions de bouquins à travers le monde pour aider les gens à arrêter de fumer. Au début du livre, il explique qu'il est allé voir un hypnothérapeute mais que cela ne lui a rien fait. Par contre, il explique qu'en sortant du rendez-vous, il a subitement réalisé qu'il était facile d'arrêter de fumer, et il n'a plus retouché à une cigarette de sa vie. Croyant avoir trouvé la formule magique de lui-même, il a ensuite écrit son fameux bouquin qui se contente de marteler tout du long comme il est simple d'arrêter la cigarette, qu'il suffit de changer d'état d'esprit. Il n'a pas fait le rapprochement avec sa séance d'hypnothérapie.
Grosse frustration de son métier, mon père se retrouve souvent avec ce genre de cas. Un anorexique qui se remet à manger et qui, guéri, lui dit "finalement je me suis guéri tout seul", après une dizaine de séance. Il faut beaucoup d'humilité pour entendre ça sans broncher, même si c'est vrai du point de vue des TCC qui considèrent le patient comme son propre guérisseur, car il ne fait qu'exploiter des ressources qui sont présentes en lui.
Première réponse à la question : une psychothérapie vous sera très utile si vous souffrez de problèmes d'ordre psychologique qui sont rédhibitoires et handicapants (comme les phobies, addictions, etc.). Un problème aussi précis et identifié est presque un "régal" pour un bon psychothérapeute, et il devrait obtenir de bons résultats rapidement.
Avant d'aller courir la gueuse dans votre nouvelle tenue, il serait peut-être bon de traiter cette phobie sociale qui vous fait perdre connaissance dans des endroits un peu trop fréquentés, non ?
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En dehors de ces problèmes très techniques et ciblés, les raisons pour aller voir un psy deviennent très subjectives. La première question que vous posera un thérapeute est : "Qu'attendez-vous de moi ?".
Il faut se souvenir que personne n'est tout à fait "normal", nous vivons tous avec nos petites manies, notre tempérament, nos bizarreries, et qu'il n'est pas nécessaire de consulter si vous vous y êtes adapté correctement dans votre vie.
Ainsi, certaines personnes souffrant de trouble bi-polaire préfèrent ne pas stabiliser leur état par des médocs, et le vivent pourtant assez bien même à de hautes fonctions. Ainsi, ils alternent les phases où leur énergie est débridée, et font preuve d'une capacité de travail surnaturelle, tandis que dans les phases down c'est à peine s'ils quittent leur lit. D'autres préfèrent stabiliser leur état car ils n'ont pas réussi à s'adapter, dans ce cas un bon psychiatre est ce qu'il y a de plus indiqué.
D'autres au tempérament enclin à la mélancolie se sont adaptés à leur dépression et vivent une vie normale, avec conjoint et enfants. Ils vivront relativement bien leur souffrance tout au long de leur vie, du moment qu'elle n'en devient pas handicapante.
Enfin, il y en a carrément qui doivent les grands succès de leur vie à ce que certains psy appellent "troubles mentaux". L'esprit de revanche sur la société anime inconsciemment certains hommes ambitieux qui ont été meurtri dans leur jeunesse par des blessures douloureuses. La réussite est un cocktail, et si on ne peut rien expliquer par un seul ingrédient, on se souviendra que la réussite matérielle trouve parfois son origine dans un besoin impérieux de se faire aimer et reconnaître, dans la peur qu'on ne sera jamais aimé si on échoue. Steve Jobs a été abandonné par sa mère biologique, Nikola Tesla a toujours voulu être digne de son frère aîné qui était brillant et dont ses parents étaient si fiers... Quel rôle a joué sa mort précoce chez le jeune Tesla, qui a ensuite cherché à combler son absence ? Tout ça n'est que spéculation, mais cela nous rappelle qu'il faut rester humble devant la richesse et le mystère qui entoure la nature humaine et sa destinée.
Dans un registre qui concerne ce forum, certains séducteurs "natural" qui sont si forts avec les femmes le sont devenus pour des raisons qui les dépassent complètement. Il ont un besoin de séduire constant dont ils se retrouvent aussi victimes au bout du compte, car ils ont du mal à nouer des relation longue stables et équilibrées. Il n'est pas rare de retrouver le schéma du type qui a des tonnes de femmes accrochées à ses pompes, mais qui se fait marcher sur la gueule dès qu'il essaye de s'investir sérieusement avec une nana qui compte vraiment pour lui.
Deuxième réponse à la question : Comme il n'y a pas de magie dans une thérapie, on ne peut pas s'attendre à ce qu'elle ait réponse à tout. Cependant, lorsque vous vous sentez coincé dans une situation qui vous fait souffrir, que les mêmes schémas se répètent inlassablement, par exemple si vous subissez un contexte familial difficile, que votre dépression vous paralyse et vous empêche d'agir... Alors une psychothérapie est indiquée.
D'une manière générale, c'est à vous de décider ce qui ne va pas dans votre vie, de constater que vous n'arrivez pas à sortir tout seul de cette situation, et de décider d'y remédier. C'est une fois que l'on a décidé de guérir et de se prendre en main que la thérapie devient vraiment efficace.
Avec votre sincérité et votre engagement, un psychothérapeute identifiera les pièces maîtresses de votre problème et vous aidera à en sortir. Son rôle est de vous "brancher" à nouveau sur toutes les ressources de guérison qui sont présentes à l'état latent et de vous aider à redevenir autonome rapidement.
2 - Comment choisir son psychothérapeute ?
Il convient de distinguer 3 grandes branches en "thérapie de l'âme", parler de "psy" tout court ne veut rien dire. Je grossis le trait et ignore volontairement certaines branches moins pertinentes à mon sens.
1 - le psychiatre : armé de ses médicaments, le psychiatre est un habitué des cas cliniques lourds (schizophrènes, paranoïaques, bipolaires, délirants, etc.). S'il n'a pas complété sa formation avec un volet TCC, il risque de vous donner des médocs (lorsque le seul outil dont on dispose est un marteau, tous les problèmes ressemblent à des clous...). Il est indispensable en cas de trouble psychique grave et certaines dépressions (en général les thérapeutes travaillent en collaboration avec des medecins lorsqu'ils sentent que les médocs seront utiles).
2 - le psychanalyste : origine de tous les clichés, beaucoup de gens prétendent tirer un bénéfice d'une cure psychanalytique s'étalant parfois sur des dizaines d'années. Je me méfie de cette discipline qui n'a jamais eu autant d'influence qu'en France, mais je ne suis pas là pour lancer un débat.
3 - Les thérapies comportementales et cognitives : trouvant leurs sources dans la sagesse grecque antique (stoiciens, épucuriens), développées essentiellement aux US, les TCC s'intéressent rarement à l'origine d'un problème et se concentrent sur les solutions. C'est bien sûr la piste que je recommande si vous n'avez pas envie de rester 5 ans ou + sur un divan.
Contrairement au cliché véhiculé par la psychanalyse, une bonne TCC peut durer de quelques séances à quelques mois (en moyenne 3-6 mois, parfois plus long), le praticien va interargir avec vous et pas simplement vous écouter pendant 10 ans, et les résultats concrets pourront être mesurés. (Sous réserve de la qualité de votre engagement).
Premier impératif : avoir une exigence de résultats. Lorsque je parle de résultat concret, je ne veux pas dire "ce que vous croyez avoir compris sur vous même", ou encore la vague impression d'aller mieux.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, les résultats d'une bonne thérapie sont parfois spectaculaires.
Vous devez pouvoir mesurer l'efficacité d'une TCC par des résultats concrets dans votre vie de tous les jours. Ça doit bouger ! Vous pouvez demander des comptes et arrêter la thérapie si vous n'êtes pas satisfait. Tous les psy ont un % d'échec, si vous sentez que ce n'est pas productif, essayez en un autre.
Si vous participez aux séminaires de Spike et que malgré votre engagment, rien ne se passe, vous vous poseriez des questions non ? Ben c'est la même chose pour les psy.
Deuxième impératif : avoir une exigence de clarté. Vous pouvez demander au psy quelles disciplines il pratique, à quoi il s'est formé, et le vérifier avec la présence de ses dîplomes au mur. S'il reste évasif, c'est drapeau rouge.
Tous les styles sont dans la nature. Vous trouverez des psychiatres remboursés qui sont formés à certaines TCC, des psychothérapeutes sans formation universitaire mais qui sont passés par des instituts sérieux de TCC (c'est le plus important à mon sens), des psychanlystes qui se sont ouverts à d'autres disciplines... La thérapie est un art et non une science. Certains styles correspondent mieux à certaines personnes.
Conclusion : en recherchant un psy, je vous conseille de vous orienter vers les thérapies comportementales et cognitives, chez des praticiens ayant plus d'une corde à leur arc. Si la formation universitaire est loin d'être un gage de qualité, il faut cependant qu'il y ait une véritable formation ne serait-ce dans des instituts non reconnus par l'état mais estimés aux US par exemple (c'est en général un bon signe). C'est un gage d'ouverture d'esprit et de sérieux, de praticiens qui cherchent à s'améliorer et restent curieux sur les progrès dans leur discipline. Une formation sérieuse implique nécessairement une bonne dose de psychopathologie, on ne s'improvise pas "psy" du jour au lendemain parce qu'on aime écouter les copines et leur donner des conseils. C'est catastrophique ! Il y a tout un savoir-faire indispensable.
Le premier rendez-vous est important. Le plus important, c'est que vous vous sentiez bien avec votre thérapeute. Si vous n'avez pas une totale confiance en lui au bout de quelques rendez-vous, n'hésitez pas à switcher, il comprendra. L'essentiel étant de trouver un praticien qui vous corresponde bien...
Voilà, c'était long, mais j'espère vous avoir aidé à faire le tri.