Itou

Modérateurs: animal, Léo

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By animal
#147213 [quote="Maurice"]Oui, j'aime le bordel dans la tête de cette jeune prétendue communiste innocente - peut-être la dernière femme de gauche authentique en Europe, une ennemie de mes convictions sans doute, une sublime ennemie de ce que je déteste aussi -, de cette passionaria du touiteur. Un vrai personnage de roman, un symbole espagnol, et bientôt européen, de jeune femme qui se débat comme le taureau que l'on torée dans l'arène. Et on voudrait qu'il, le taureau, qu'elle, l'Aube, ne se débatte pas quand la Nuit menace ?

Un personnage littéraire en soi.

1 an de prison.
Je me disais aussi, un Maurice très de droite qui soutient une jeunette très très à gauche, c'était bizarre...
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By Maurice
#147237 Oula, effectivement je ne soutiens personne ici.

C'est qu'habité par ce texte de Montherlant, je m'en suis allé divagué en amateur dans la prose poétique, en profitant de quelques télescopages, avec prolongement imaginatifs (je ne dis cependant pas que c'est du toc ce que je raconte) : c'est du ressenti travaillé. Je ne dis pas : "Libérez Alba!" (ils feront bien ce qu'ils veulent là-bas).

On peut être très à droâtre, ou très à grôche ou très au senthre... hormis quelques joutes orales qui sont toujours l'occasion d'un bon exercice de réveil-neurones et l'opération d'aller voter, le reste du temps on se doit à mon sens d'être une personne normale et ne refuser de faire société avec personne - car tout n'est pas que grôche, droâtre ou senthre non plus dans la vie, et sinon cela s'appelle du fanatisme !
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By Stan
#147284 [quote]On peut être très à droâtre, ou très à grôche ou très au senthre... hormis quelques joutes orales qui sont toujours l'occasion d'un bon exercice de réveil-neurones et l'opération d'aller voter, le reste du temps on se doit à mon sens d'être une personne normale et ne refuser de faire société avec personne - car tout n'est pas que grôche, droâtre ou senthre non plus dans la vie, et sinon cela s'appelle du fanatisme !

+ 1000

Faut pas mettre les gens dans des cases animal... Tu peux très bien être très à gauche sur certains sujets et très à droite sur d'autres...

Il ne me semble pas, à cet égard, que Maurice — qui me reprendra si je dis une bêtise — soit de droite en économie par exemple.
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By Maurice
#147286 Oui et non, Stan. Oui et non ! :).

Toute cette lecture des Bestiaires, et ce que j'en dis et montre, me donne une envie furieuse de faire quelque chose... Dommage je suis passé, c'était fermé. Bon, je vous dis plus tard car quand c'est pas fait y a rien de fait.
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By Thorgal
#147294 [quote="Maurice"]
Toute cette lecture des Bestiaires, et ce que j'en dis et montre, me donne une envie furieuse de faire quelque chose... Dommage je suis passé, c'était fermé. Bon, je vous dis plus tard car quand c'est pas fait y a rien de fait.
Tu voulais te faire tatouer le visage de Montherlant quelque part ?!
By Synchronn
#147423 Le codex Seraphinianus.

Un article "papier" prenait pour personnage principal ce livre étrange et expliquait que si les hommes du futur tombaient sur un livre de ce genre, cela pourrait perturber leur perception de l'histoire humaine (bien sur en sortant du cadre médiatique, internet et autres sources d'information).

Pour ceux qui n'ont pas eu l'occasion de le feuilleter, il est accessible ici :

http://www.cetteadressecomportecinquant ... nianus.pdf
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By Ventel
#147506 Petite anedocte sur Montherlant.

Nous savons tous qu'il s'est suicidé en se tirant une balle dans la bouche en 1968, lorsqu'il devint aveugle à la suite d'une insolation.
En fouillant les vidéos Youtube, je suis tombé sur cette interview télévisée où Montherlant nous parle d'un homme qu'il a beaucoup aimé pendant sa décennie de nomadisme, le matador Belmonte.
Brièvement, Montherlant nous explique,sans la moindre pudeur, que celui-ci s'est suicidé d'une balle dans la bouche.

[video]https://www.youtube.com/watch?v=oq4zVkzd71w[/video]

Étonnant comme on peut parfois parler de la mort d'un autre, et puis, par les aléas de la vie et du fatum, suivre la même voie que cette personne qu'on a admirée. Tout ça nous ramène aux frappants bouleversements que peuvent parfois subir nos destinées.
Nous vivons tous naïfs.

Cette semaine, vu que j'avais un peu de temps pour flâner, j'ai remis les pieds dans une cathédrale. Je tenais à admirer, seul, les chapelles, les ogives, les énormes colonnes de pierre, les vitraux, les tombes des seigneurs féodaux presque effacées par les pas des croyants, les reliquaires et les sculptures de Brœucq, restaurées par les mains habiles et expertes des artisans sculpteurs. Parmi toutes ces œuvres d'art, je me sentais comme emporté, comme transporté en dehors du temps, loin des inquiétudes du quotidien, avec la fabuleuse Gnossienne n.1 d'Éric Satie en tête.
Après plus d'un quart d'heure de contemplation, je m'offrais déjà le luxe — moi qui ne crois absolument plus en Dieu — d'imaginer pendant l'ombre d'un instant, comme le ferait un enfant lorsqu'il lit tout seul un conte de Perrault, la présence d'une force supérieure, voire d'une entité céleste, dans ces lieux que je foulais.

Bref, en sortant de là, j'avais trois conclusions insoutenables en tête :
- Il est très facile de se laisser distraire par la pensée magique qui cherche à tout prix à nous faire fuir du réel.
- Le silence (et l'indifférence) de Dieu est lugubre.
- Il est permis à l'homme d'être indifférent devant Dieu, car Dieu est lui-même indifférent devant les hommes (Épicure).
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By Maurice
#147522 Tiens, sans avoir cherché à faire de l'Epicure, je dis parfois, lorsqu'on cherche à me reconvertir à la croyance que si Dieu voulait que je crusse, il viendrait me le dire en face au lieu de faire des cachoteries de gamin.

Superbe interview de Montherlant qu'il est bon de revoir avec son très joli usage peut-être un peu forcé du passé simple. Sur son suicide, très malade et rendu aveugle, il n'avait plus le goût de vivre. A noter que cette vidéo ne devait être diffusé qu'après sa mort, ce qui fut fait le lendemain (je raconte ceci de mémoire).

A propos des Bestiaires, je comprends mieux les réticences de certains. L'épilogue m'est tombé des mains et je dois dire que certains passages, comme ceux sur la procession ou quelques digressions un peu trop poussées sur Mithra peuvent un peu décontenancer.
Ce n'est peut-être pas un grand livre en ce sens qu'il me semble qu'il faut déjà bien connaître l'Espagne et un peu la tauromachie pour en apprécier toutes les subtilités, sans doute (et notamment quelques hispanismes qui m'ont fait sourire).

Mais hormis quelques réserves, c'est ma grande découverte de ce trimestre de lecture. Et ceci, grâce au forum : il ne me serait jamais venu à l'esprit de lire Montherlant sans spikeseduction ! (Il m'était resté en tête les caricatures du couple Sartre / Beauvoir parlant d'écrivain "nazi" ou à l'esthétique nazi... Ces deux là sont évidemment visés par la partie concernant l'"épuration" littéraire. Il faut lire ce que dit Beauvoir sur Montherlant dans le "deuxième sexe"...

D'ailleurs Montherlant, très tôt, a été DESTESTE des féministes, si j'en juge par ce petit entrefilet de journal cité dans les Bestiaires :

[quote]Quel bonheur, mes Abeilles! Montherlant, ce poseur, vient de recevoir un coup de corne dans les reins. C'était exactement ce que je lui souhaitais. Brave taureau, va!

La Femme de France (petite correspondance), 24 janvier 1926.

Et ce sont là les derniers mots à proprement parler des Bestiaires !


A propos de l'emploi du mot fatum, mon cher Ventel, attention au snobisme qui veut qu'on se mette à parler "grec" ou "latin" (snobisme du lettré et du médecin) comme d'autres parlent "anglais" (snobisme du commercial et du fêtard). Si tu avais parlé du monde romain, cela avait sans doute son sens, mais ici, j'en doute, et je pense que certains de tes lecteurs sont restés un peu interrogatifs devant ce mot : il signifie tout simplement "destin".

Place maintenant à Moravia, dont je continue l'exploration de l'oeuvre avec donc son :

[img]http://pmcdn.priceminister.com/photo/894200329.jpg[/img]

Tout un programme ! :mrgreen:
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By Ventel
#147544 [img]http://gustavelechat.files.wordpress.com/2011/04/les-trois-mousquetaires.jpg[/img]

Retour au source : j'ai commencé avec Montecristo et je poursuis le voyage avec D'Artagnan.

Je commence à comprendre ce qui influence mes choix de lecture.
Je cherche à chaque fois à discerner la part "homérique" qui peut se cacher sous un livre ; j'essaie toujours de trouver des personnages qui se créent une destinée hors-norme et héroïque ; et je convoite, plus qu'autre chose, des ambiances que je ne pourrais plus/pas connaître de mon vivant.

Ma fascination pour Hugo et Dumas a donc un sens. Il y a bien un lien et un intérêt justifié à cette obsession qui me suit. J'aime par-dessus tout les auteurs qui ont travaillé leurs écrits, leurs histoires, leurs idées, pour devenir des héritiers d'Homère.
H. & D. sont deux auteurs qui ont réussi à faire de leur œuvre une sorte de mythologie où s'accomplissent (et se meurent) de grands noms dans le monde sinistre qui est le nôtre.
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By Ventel
#147545 Retour aux sources.*

J'avais d'abord pensé à retourner à une seule source (la mienne) ; et puis, je me suis désisté (par crainte?) sans penser à ajouter le pluriel.

Quand l'inconscient nous titille, voilà le résultat. :twisted:
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By Maurice
#148025 Que dire de ce La Révolution culturelle de Mao d'Alberto Moravia, sinon qu'il pourrait aussi s'appeler "Naufrage d'un intellectuel aveugle" ? Et certes, il n'est pas inintéressant de lire un de ces témoignages édifiants d'intellectuels voyageant dans un des pays de leur coeur et ne voyant rien de ce qui se passe en réalité dans le pays (J'ai des souvenirs de pages et de pages de de Beauvoir ou de Sartre à Cuba qui sont réellement pathétiques).

Il est aussi amusant de constater combien les marottes des intellectuels ont pu changer en 30 ans. Mais ils sont où, mais ils sont où les ma-o-ïstes ?

Moravia plaque sa grille de lecture du rapport communisme / capitalisme sur la Révolution culturelle de Mao, ou plutôt sur ce qu'on veut bien l'en laisser voir. Quant à lui, ce qu'il montre, c'est la haine de la culture, la haine de tout passé, la haine de l'homme tout simplement et met en adéquation son rêve d'un homme nouveau avec les grossières et hautement criminelles manipulations de Mao pour conserver le pouvoir, coûte que coûte.

Il ne voit pas que Mao est un despote absolu qui fait encore plus fort que Staline : il va jusqu'à créer une quasi guerre civile (avec morts à la clé) entre ceux fanatisés qui s'opposent quant à la bonne interprétation de ses textes pour le moins abscons.

La Révolution culturelle, c'est une jeunesse totalement fanatisée dont on lâche les chiens en leur faisant croire, et en faisant croire au monde entier, qu'ils expriment la régénérescence de l'idéal communisme - alors que Moravia lui-même montre que pas un de ces Chinois ne pense par lui-même, ni ne comprend vraiment en définitive ce qui lui arrive.

Les millions de morts, les DIZAINES de millions de morts causés par Mao (et il en est de même par Staline dont il n'est jamais fait mention en mentionnant le personnage dans le livre, à tel point que je soupçonne vraiment Moravia d'avoir des sympathie stalinienne) durant le Grand Bond en Avant puis durant la Révolution culturelle, sont totalement passés sous silence.

Finalement, ce bourgeois, qui dans quelques éclairs de lucidité se reconnaît comme tel, se hait lui-même, à la suite d'un Sartre par exemple (et ici peut-être bien en précédant Sartre). Il sera à l'image d'une partie de la jeunesse française qui par haine de ce qu'elle est se fera maoïste - certes aussi plutôt par idéalisme encore une fois mal placé pour les filles, plutôt par envie de les baiser pour les garçons.

Reste qu'on a affaire à un conteur de talent, mais ce livre n'aurait sans doute jamais été édité s'il n'avait pas été de Moravia. On y apprend des petites choses - et Moravia est bon dans les petites choses - qui finissent par être intéressantes lorsqu'elles ne sont pas polluées par son idéalisme politique. A la toute fin du livre, il est fait mention de la Table Verte de l'Armistice qui se trouve pile sur la frontière entre la Corée du Nord et la Corée du Sud (pays toujours officiellement en guerre, il convient de le rappeler) et sur laquelle se rencontre tous les jours depuis 60 ans Américains et Sud-Coréens d'un côté de la frontière délimitée par les fils des micro et Nord-Coréens de l'autre. Et il sait être drôle lorsqu'il met en scène cette Américaine qui cherche des communistes comme d'autres vont faire un safari en espérant voir le lion ou viennent à Paris pour voir la Tour Eiffel.

[img]http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/bb/Staff_Sgt._Jim_Baker%2C_United_Nations_Command_Military_Armistice_Commission%2C_left%2C_and_other_security_personnel_from_North_and_South_Korea%2C_attend_a_joint-duty_officers_meeting_in_the_Military_Armistice_Building_DF-ST-89-04864.jpg[/img]

Pensée pour Lin Zhao, exécutée au moment où cet ouvrage de Moravia sortait en France, durant le second trimestre 1968.
[img]http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/2/28/LIN_Zhao.jpg/220px-LIN_Zhao.jpg[/img]
http://fr.wikipedia.org/wiki/Lin_Zhao

Sur la Révolution culturelle, une des périodes les plus folles de l'Histoire de l'Humanité et qui me fait plutôt penser à certaines périodes monstrueuses de l'Histoire romaine : [url]http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_culturelle[/url]

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Place à Louis Pauwels, celui-là même qui nous avait scandalisé pour son expression "sida mental" qualifiant l'état de la jeunesse de France durant les manifestations lycéennes et étudiantes de l'automne 1986. Comme il avait raison !

Cependant, il serait totalement inutile de le résumer à cette seule phrase. Quel parcours étonnant que celui qui était instituteur, proche du PCF qui finira éditorialiste au Figaro et converti au catholicisme, éditeur de revues très écléctique, littérature, érotisme, science-fiction et qui semble avoir plusieurs vies comme peuvent en témoigner ces quelques citations :

[quote]Les faibles ont des problèmes. Les forts ont des solutions.
L'égalité est une injustice faite aux plus capables.
Ceux qui craignent, avec tant de bonté, qu’on lave le cerveau d’un quidam savent laver le cerveau d’une nation.
L'indifférence n'est pas une fatigue de l'âge. C'est la cessation des choix.
Gardons-nous d'appeler amour ce qui relève seulement du hasardeux frisson et de la brève moiteur.
Chaque fois que le christianisme s'efface, l'idée de bonheur resurgit.
Les esprits sont comme les parachutes. Ils ne fonctionnent que quand ils sont ouverts.
Tout ce qui est important est ignoré.
Sur cette Planète tous les hommes meurent, mais peu vivent.

Bref, les curieux pourront aller lire :[url]http://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Pauwels[/url]

Il y a une autre entrée dans le forum sur cet auteur, aussi mes réflexions, s'il y a lieu, auront lieu plutôt là qu'ici.

[img]http://www.livre-po-cher.com/catalog/images/romanbio/commentdevienton.jpg[/img]