Itou

Modérateurs: animal, Léo

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By la mouche
#146206 [quote="Maurice"]Ce que tu dis est assez juste, nous vivons dans une époque :
- de disâgne industriel, où l'ingénieur disâgneur industriel galvaude totalement le titre d'architecte.
- du fonctionnalisme-roi (le grand point commun entre toutes les idéologies dominatrices du XXème siècle), du futurisme, du modernisme garanti 100 ans d'âge.
- où l'homme se rêve en culture hors-sol, désincarnée, comme flottant dans le monde des idées (de nombreuses constructions n'ont pas de rez de chaussée mais juste des piliers (université de Jussieu par exemple) et nomade (inspiration de la construction navale, du paquebot)

J'ajouterai un tiret: la volonté de tout expliquer, son projet, son fonctionnement. Quand tu les écoutent, la moitié des designer veulent construire des gadgets ludiques, faciles à prendre en main... On a la fin conjointe du mystère (dimension hermétique de la création), parallèle à une explosion de l'infantilisme (volonté de faire que du ludique)

Aucun rapport mais j'ai beaucoup aimé ton article sur Barrès, Maurice
By Tantris
#146400 [quote]J'ajouterai un tiret: la volonté de tout expliquer, son projet, son fonctionnement. Quand tu les écoutent, la moitié des designer veulent construire des gadgets ludiques, faciles à prendre en main... On a la fin conjointe du mystère (dimension hermétique de la création), parallèle à une explosion de l'infantilisme (volonté de faire que du ludique)

Aucun rapport mais j'ai beaucoup aimé ton article sur Barrès, Maurice

Ca c'est pas la faute des architectes amigo... Aujourd'hui dans un projet urbain/architectural si tu fais pas un dossier de 500 pages de programmation qui justifie absolument tout tout tout, à la moindre merde après c'est tribunal administratif et bye bye ton petit projet que t'a mis 5 ans à développer.
Encore une fois le problème de vouloir toujours plus légiférer partout, sans voir d'où vient vraiment le problème. La on parle de l'efficacité de la dépense publique, comme si une loi allait changer les choses en contraignant les décideurs politiques alors qu'on sait que c'est pas une question de manque d'intelligence mais plutôt de corruption/copinage entre décideurs publics et entreprises privées et qu'une loi on peut toujours la contourner si on est pas trop débile.

D'où cette perpetuelle justification qui n'a plus aucun sens à chaque projet.
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By Maltese
#146409 [quote]D'où cette perpetuelle justification qui n'a plus aucun sens à chaque projet.

Et encore, la France est un des pays les plus chiant niveau législation architecturale. A tel point qu'il existe des agencements totalement illogiques, comme l'obligation d'avoir des toilettes handicapés au 3ième étage sans qu'il y ait d’ascenseur adapté pour y accéder.
Regardez la différence entre l'architecture française et l'architecture allemande, et vous aurez une bonne idée de ce qu'est une législation plus souple et pour des trucs pas trop dégueulasses.
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By Maurice
#146488 Merci La Mouche !

Voilà, je viens de finir ce livre de Barrès, Du sang, de la volupté et de la mort.
Il mêle donc dans un style poétique - parfois trop - des récits et des chroniques sur le thème du voyage entre Bruges, la Castille, l'Andalousie, la Toscane, Paris et Versailles.

Comme je l'ai déjà dit, certains textes me sont un peu tombés des mains. D'autres sont passionnants.

Pour moi qui connais ces régions d'Espagne, j'y ai trouvé des explications très pertinentes, notamment cette tendance toujours nette entre une avidité matérialiste franche et affirmée (dont l'Espagne paie actuellement le prix d'ailleurs, tellement ses habitants se sont goinfrés depuis une trente ans) et une aspiration au spirituel et un désintéressement qui en font un peuple d'où l'idée de mort n'a pas disparu (et dont la corrida consisterait en une synthèse terriblement païenne dans ce pays si catholique). J'y ai retrouvé beaucoup de cette Espagne moins touristique sans doute que Barcelone, mais au final tellement plus vivante, tellement plus authentique : là-bas j'ai retrouvé ce que signifie le mot "peuple" - notion qui perd tellement de son sens à Paris.

On trouve dans les "Bijoux perdus" cette même description des fabriques de cigares que Pierre Louÿs a faite dans la Femme et le pantin, et qui laisse à l'auteur ces quelques pensées mélancoliques, qui me parlent d'autant plus que ce sont des réflexions que je me suis déjà faites sans jamais avoir osé les confier à qui que ce soit.
"Mais un trésor enfoui, ce n'est point le plus mélancolique. Ces quatre mille femmes ne dureront que peu d'années. Une merveille qui est en train de disparaître : voilà le trait qui complique de fièvre toute volupté ! Être périssable, c'est la qualité exquise. Voir dans nos bras notre maîtresse chaque jour se détruire, cela parfait d'une incomparable mélancolie le plaisir qu'elle nous procure. Il n'est point d'intensité véritable où ne se mêle l'idée de mort".
Cela confirme cette idée de la manière de pensée de Barrès dans cet ouvrage : on part d'une anecdote, on éprouve une émotion, on analyse cette émotion et on touche peut-être à l'universel.

Ses pages sur la Toscane sont magnifiques : elles consistent plus en des anecdotes historiques délivrés parfois de manière un peu arbitraire mais qui jette une lumière intéressante sur ces villes que sont Florence, Venise, la lac de Côme, le lac majeur, Sienne, Pise, Parme et j'en oublie, sans compter un passage par Rome la Catholique en soi. Elle m'ont à nouveau motivé pour me remettre à l'italien, lequel a sacrément pris la rouille depuis toutes ces années, et m'a donné l'envie de faire un voyage en Italie, un jour (un vrai voyage en voiture).
Ceci étant, cette Toscane, si souvent violée dans les siècles passées sont

Ce sont des idéologies passionnées qui se donnent à lire, par l'auteur de celui qui désirait une Religion du Moi - à la suite de Wagner, de Nietzsche, qui commençait à être lu. C'est aussi de ces ouvrages à emmener en voyage et qui plus utiles que les guides de ce qu'il y a à voir, mettent à jour ces sentiments confus que nous éprouvons devant le Beau exotique et que nous n'analysons pas faute d'outils. Sensations que les drogués du voyage recherchent souvent, cette exaltation devant un monde nouveau qui s'offre à eux, mais qu'ils ne savent pas savourer comme étant une invitation à devenir, ne serait-ce qu'en partie, citoyen de ce pays, tandis que leur corps, se révoltant de plus en plus contre ce genre de nouveauté, sert de prétexte pour aller voir ailleurs, ne fréquenter que des Français à l'étranger ou à rentrer chez soi.
Je me dis que si on n'a pas vécu plus d'un an dans un pays étranger, et mieux deux ans (le cycle des saisons, des festivités puis la compréhension de leurs routine participant de cette compréhension) et si on n'y parle pas la langue, c'est un peu comme si on n'y était jamais allé, c'est pourquoi je trouve que ceux qui accumulent les voyages - quand bien même ce serait une exigence féminine contemporaine que cette collectionnite - sont dans une sorte de nomadisme vain dont finalement il reste peu de choses - j'ai toujours été déçu par les récits de voyageurs cumulatifs, du genre de ceux qui font des tours du monde : ils ont des anecdotes, un peu redondantes, ils ont des opinions basées sur des impressions bien furtives, mais surtout ils ont vécu des choses fortes auxquelles bien souvent ils n'ont pas donné le temps nécessaire pour les traduire en concept, l'appel du pays suivant que l'on coche dans un agenda imaginaire joint à l'appel de nouvelles sensations étant le plus fort. Certes, c'est un semi-libertin du voyage que ce Barrès, et c'est justement peut-être ce qu'li lui manque, par delà son intelligence et sa culture, pour toujours réussir à toucher le lecteur, pas assez espagnol, pas assez italien sans doute et on se met à penser, 120 ans plus tard : "Mais idiot ! Passe donc un an dans ce pays puis une autre année dans ce pays-là et tu l'auras ton chef d'oeuvre, en nous donnant le goût de la vie telle qu'elle est dans sa routine, là-bas !"
By Synchronn
#146516 Je devrais recevoir mes deux prochaines lectures par Amazon, cette semaine !

[url=http://imgur.com/achXxah][img]http://i.imgur.com/achXxah.gif[/img][/url]

[url=http://imgur.com/r6004OQ][img]http://i.imgur.com/r6004OQ.jpg[/img][/url]

Sur les conseils d'un ami dingue de Trail pour la motivation.
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By Maurice
#146667 Tu nous en diras deux mots j'espère !

***

Me voici maintenant attaquant Paulina 1880 de Pierre Jean Jouve.

Je partais avec un a priori négatif à propos de ce livre, étant donné que c'est une femme avec une tête de psychanalysée qui me l'avait vivement conseillé. Mais en même temps, le titre m'intriguait... Et je l'achetais à mon brocanteur.

L'autre a priori négatif vient de la page wikipédia de Pierre Jean Jouve, mort en 1976, que j'ai survolé.

Nous voici donc en Italie à la fin du XIXème siècle, à Milan et sa région pour être plus précis. Paulina appartient à une riche famille.

Extrait qui révèle en tout cas un grand talent de conteur, Paulina a 13-14 ans :

Chapitre 7 (entier, ce sont des courts chapitres, comme des tableaux isolés, comme vous allez pouvoir vous en rendre compte : )
[quote]Elle adorait un chevreau à la ferme de Torano. Il avait les yeux doux, tendres, pleins d'étonnement, comme les siens. Elle l'enfermait dans ses bras et courait l'ayant sur sa poitrine. La chaleur du petit animal l'emplissait de trouble et de crainte, pourtant elle était sûre que le chevreau fût un pur esprit, une âme, une personne mystérieuse incarnée. elle allait jusqu'à le rapprocher de l'Agneau Divin dont le curé Paoli parlait en chaire. Elle embrassait nerveusement son museau qui tremblotait, et elle restait une heure en extase devant ses yeux à la pupille horizontalement fendue qui lui donnaient son air diabolique. Elle aimait surtout l'emporter le soir quand la lune monte dans le ciel vert avant la période des chaleurs ; leurs entretiens étaient alors pleins d'une poésie admirable et terrible, celle des choses qui vont affreusement finir. Le fermier qui n'aimait pas Paulina fit savoir qu'il égorgerait cette bête comme les autres. Paulina voulut courir à Milan, se jeter aux pieds de son père, elle n'en avait pas le temps et le chevreau serait tué le soir même. Sa mère était en voyage, personne au monde ne pouvait plus sauver le bien-aimé; indifférent comme toujours et qui broutait l'herbe devant ses yeux obliques. Alors l'esprit de Paulina fit une brusque conversion ; entrant dans l'étable elle déclara que le chevreau serait tué, tué, mais tué par sa main à elle. Le fermier méchant ricana, l'aida, poussa sa main. Elle sentit le couteau pénétrer dans le cou de la bête, sa main fut mouillée de sang chaud, elle était droite, glacée, le regard terriblement absent, et seule sa petite lèvre inférieure avait une palpitation.

L'ouvrage a fait l'objet d'un film de Jean-Louis Bertucelli dans les années 70.

[img]http://www.pierrejeanjouve.org/Jouve-Cinema-Medias/Jouve-Cinema-Bertucelli/Images-Bertucelli-Paulina/Paulina-Bertucelli-214.jpg[/img]

[img]http://www.pierrejeanjouve.org/Jouve-Cinema-Medias/Jouve-Cinema-Bertucelli/Images-Bertucelli-Paulina/Jouve-Paulina_1880-Folio_1974-Photo_Film-493.jpeg[/img]
Folio de 1974 reprenant une image du film.
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By Maurice
#146785 Voilà, lecture achevée et décevante. Je ne comprends pas en quoi ce roman intimiste a quelque chose d'italien.
C'est un roman teinté de psychanalyse en effet et qui part dans le n'importe quoi irréaliste. Reste qu'il demeure un petit peu surprenant et n'est donc fort heureusement pas trop ennuyeux (sans être non plus extraordinairement passionnant). Titre possible alternatif : "Ma Borderline au couvent".
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By Maurice
#146833 Bon, adieu Paulina 1880, direction Le Bon Coin !

*****

Voilà, j'ai commencé les Bestiaires de Montherlant, et tout de suite, j'ai l'impression d'être confronté à un chef d'oeuvre et je me demande pourquoi un tel livre n'est pas étudié en classe alors qu'il pourrait parler à des adolescents (mais vues les "amitiés particulières" de Montherlant, peut-être en est-il fait mention dans cet ouvrage ? - Et puis, Montherlant est un auteur de droite, et on n'aime pas les auteurs de droite à l'Education nationale (feuilletez un manuel de 3ème pour être édifié))... Enfin par ailleurs, si on veut absolument initier les collégiens aux amours insolites, que ce soit fait au moins avec un grand auteur qui sait écrire et non par trois énergumènes venus vendre leur homosexualité institutionnalisée.

C'est un roman à forte résonnance autobiographique, d'après ce que j'en sais de par l'introduction.

J'ai la chance de posséder en double ce roman. Tout d'abord un vieux Livre de Poche pourri que je trimballe dans le métro, et ensuite une édition illustrée et reliée Rombaldi, de ces merveilleux livres illustrés qu'il n'est pas trop rare de trouver à 1 euro ici ou là. C'est fou comme le marché du livre est en crise, et c'est fou comme des pièces très agréables à posséder et à feuilleter sont bradées faute de lecteur - on arrive à une période où ceux qui ont acheté pendant le boom du livre commencent à mourir et où le marché de l'occasion s'en trouve saturé, puisque les gens trouvent qu'il est plus intéressant de regarder Staraque ou je ne sais quoi.

Il fut un temps où les livres se transmettaient par héritage, maintenant les héritiers ne savent plus quoi en faire et bradent ça 20 centimes le kilo au brocanteur du coin. C'est d'ailleurs la même chose pour les meubles. Vous trouvez des meubles traditionnels en bois massif à prix dérisoire en vous débrouillant bien : les gens préfèrent du disâgne Ikea à des armoires bretonnes datant de 4 générations. C'est là un grand mystère. (On peut trouver des meubles magnifiques vendues 100 - 200 euros en dépôt vente, parfois moins... de ces mêmes meubles dont personnes ne veut et qu'on retrouve en vente en Espagne entre 500 et 2000 euro, car nos meubles y ont encore bonne réputation. Le goût américano-suédois fait des ravages dans les têtes, mais pour ceux qui ont un peu de cervelle, c'est l'occasion de faire des affaires en or !)

L'équivalent exact de ma collection Montherlant de chez Rombaldi, trouvé pour 5 euro (que quelqu'un essaye de vendre 40 euro chez e bay... bon courage !)
[img]http://i.ebayimg.com/00/s/MTAyNFgxMDA5/z/tIMAAOxyXDhSpfVF/$_57.JPG[/img]

On trouve aussi Montherlant en Pleïade, dont les prix en occasion ont grandement chuté. Il fut un temps où il était prestigieux de posséder des ouvrages de la Pleïade : le problème de ces belles éditions étant qu'il faut aimer lire sur papier bible, ce qui n'a jamais été mon cas.

Voici un exemplaire mon Bestiaires spécial métro (ceci étant, j'aime de plus en plus les couvertures du Livre de Poche des années 50 - 60).
[img]http://ecx.images-amazon.com/images/I/71PJ0fePY5L._SL1031_.jpg[/img]

Je n'achèterai jamais de cette cochonnerie de liseuse - et vous, jeune homme qui aimez donner à converser au cas où... n'en faites jamais rien malheureux !!! Et j'aime suprendre un regard curieux d'une personne se demandant ce que je peux bien lire - ou ayant même un regard de dédain voyant que je lisais du Barrès (l'auteur nationaliste par excellence ! quelle horreur ! Lire Barrès sur la Ligne 1 du métro ! Vade retro ! Montherlant ayant à peine meilleure presse, pour cause notamment d'étrillage en série sartrien-beauvoiresque, qui m'a empêché de goûter auparavant cet auteur, je m'attends à peu près à subir le même traitement, sauf entre Châtelet et Bastille - encore qu'à Montherlant, ça lui aurait sans doute fait tout drôle qu'on puisse se marier entre invertis, bref encore un homosexuel homophobe sans doute :mrgreen: ).

Il faudrait d'ailleurs étudier plus à fond cette forte inimitié entre celle qui s'est faite virée pour détournement d'élèves dans les années 40 (la Beauvoir) et Montherlant : je me demande jusqu'à quel point saphistes et platonistes peuvent se sentir, et si l'un ne serait pas le phobe de l'autre.

J'ajoute que pouvoir lire dans le métro (ce qui n'était pas mon cas auparavant, mais je suis bien content de le pouvoir maintenant) est un magnifique argument contre l'achat d'une automobile (encore que certes, je ne place pas du tout l'audio-livre pour moins intéressant que le livre papier).

Voici donc le début, et Dieu quel début !

[url=http://www.hostingpics.net/viewer.php?id=69113135a.jpg][img]http://img15.hostingpics.net/pics/69113135a.jpg[/img][/url]

[url=http://www.hostingpics.net/viewer.php?id=82368921aa.jpg][img]http://img15.hostingpics.net/pics/82368921aa.jpg[/img][/url]

Deux mots sont difficilement lisibles (j'en suis désolé, je suis nul en photos de près) : "La course de taureaux fut pour l'enfant la première des trois grands révélations" et "Immédiatement, sans cesser d'être Romain, on devint taurin".

Citation bonus : "Ce qui est gagner et perdre : la timidité enrichit la vie de nuances que l'audace et trop de facilité suppriment".
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By la mouche
#146930 C'est très drôle, j'aime beaucoup Montherlant, que ce soit son théâtre ("la reine morte") ou ses récits (on ne présente plus le cycle des jeunes filles), mais je n'ai jamais accroché au bestiaire. C'est le seul de ses livres que je n'ai pas eu envie de finir.

Qu'est ce que tu aimes dans ce roman, un thématique, une manière de traiter? J'aimerais ton avis sur le passage que tu as photographié, qu'est-ce que tu apprécies particulièrement dedans?
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By Stéphane
#146932 [quote="la mouche"]C'est très drôle, j'aime beaucoup Montherlant, que ce soit son théâtre ("la reine morte") ou ses récits (on ne présente plus le cycle des jeunes filles), mais je n'ai jamais accroché au bestiaire. C'est le seul de ses livres que je n'ai pas eu envie de finir.

Qu'est ce que tu aimes dans ce roman, un thématique, une manière de traiter? J'aimerais ton avis sur le passage que tu as photographié, qu'est-ce que tu apprécies particulièrement dedans?
+1, je n'en ai gardé nul souvenir, ce qui est un comble quand on sait combien j'estime Montherlant
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By Maurice
#146934 Bon, alors si le reste de Montherlant est encore meilleur, ça promet !

J'aime dans l'incipit quelque chose d'assez proustien, ce monde de sensations et cette impression que le monde réel peut plier devant le premier, mais dit déjà sur un ton humoristique (cf le passage sur Quo Vadis qui m'a fait sourire)
C'est déjà l'enfant qui va éprouver son imaginaire dans le monde des adultes, un adolescent à qui on laisse aussi expérimenter le monde et qui s'en donne à coeur joie ! On est entre la comédie héroïque (un enfant qui joue aux adultes) et le burlesque (un adulte qui est un enfant).

L'épisode de la corrida de Madrid, c'est Charlot aux taureaux ! :) Tout va absolument de travers et c'est de pire en pire !

Ensuite, c'est un "espagnol", et il parle magnifiquement bien du monde ibérique : son agacement devant leurs coutumes et en même temps son admiration pour cette même manière de vivre, deux faces d'une même monnaie, c'est ce que j'ai vécu là-bas. Il sait très bien parler de plein de petits détails, et il me fait rire avec ça, par exemple l'accent andalou, qui est un pur bonheur et à la fois une vraie terreur pour qui sait parler castillan. Le tout dit avec cet humour supérieur qu'on nomme "esprit".

Exemple : "(...) on attendait la duchesse et sa fille qui, déjeunant en ville, devaient passer prendre le duc avec l'auto, et probablement seraient en retard, parce que femmes, parce qu'en auto..." J'adore ce genre de traits ! :D

A tout amoureux de l'Espagne, ce livre fera vraiment forte impression - du moins ce que j'en ai lu.

Ensuite, étant bien entendu que je n'en suis qu'à la page 50, ce livre donne une pêche phénoménale. Il pousse à l'action avec tout le romantisme dû à la jeunesse - ces projections, que malgré tout on est bien obligé d'avoir pour désirer une femme réellement (non ?). Cela me donne une certaine nostalgie de ma jeunesse - car quel adolescent ne se reconnaîtrait pas dans sa gaucherie et son impatience ? Et on aimerait que cette journée où le héros montre ses prouesses, ne terminât jamais tellement l'auteur nous fait partager les mille et un sentiments qu'il peut éprouver à ce moment-là : du grand art.

Enfin, rien à faire, j'aime la Belle Epoque, et tout récit s'y passant me plaît souvent beaucoup.
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By Stéphane
#146936 [quote="Maurice"]Enfin, rien à faire, j'aime la Belle Epoque, et tout récit s'y passant me plaît souvent beaucoup.

+1, même si, né à cette époque là, ma couleur de peau m'aurait condamné à garder les carrosses ou à traire les vaches, ces années m'attirent énormément.
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By Maurice
#146937 Ca, c'est un grand mystère et je n'en sais rien, mais les Bretons débarquant dans la capitale avaient souvent un sort qui n'avaient rien à envier à ce que tu dis !
[url]http://www.gavroche-pere-et-fils.fr/la-petite-bretagne-de-paris/[/url]

Pour les gens des Iles, on a évidemment quelques rares cas célèbres fin XVIIIème et courant XIXème qui te feront un peu démentir - encore que posséder des vaches était déjà un certain signe de prospérité, le beurre coûtant bien cher à l'époque (d'où l'invention de cette infâme margarine sous Napoléon III puis les scandales de coupages de beurre à la margarine), et être employé d'une grande maison ayant carosse, n'était là non plus pas la pire des conditions !
[url]http://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_Alexandre_Davy_de_la_Pailleterie[/url]
[img]http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_Duval[/img]

Mais si quelqu'un a de la documentation sur d'autres présences de gens venant des iles, en particulier entre 1875 et 1914, je suis preneur ! (Ceci étant, les iles ayant besoin de main d'oeuvre, et vu qu'on en important notamment des Indes, je suppose que l'émigration a été peu importante à cette époque).
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By Maurice
#146939 En 1913, une statue du général Dumas par Alphonse de Perrin de Moncel, exaltant les origines africaines du héros, est érigée à Paris, place Malesherbes (17e), aujourd'hui place du Général-Catroux, après une campagne soutenue par l'écrivain Anatole France, qui déclare : « Le plus grand des Dumas, c'est le fils de la négresse. Il a risqué soixante fois sa vie pour la France et est mort pauvre. Une pareille existence est un chef-d'œuvre auprès duquel rien n'est à comparer ». La statue a été abattue pendant l'Occupation par les autorités allemandes par les collaborateurs français.

En 2009, inauguration d'une stèle au nom du général Dumas dans le Parc de Coquibus à Évry.

***
Voici ce qui me semble être la statue que je trouve pour ma part réussie, érigée en 1913.

[img]http://paris1900.lartnouveau.com/paris17/rues/place_general_catroux/cpa/1stat_gal_dum.jpg[/img]

C'est toujours mieux que cet effroyable bidule qui rouille censé lui rendre hommage depuis 2009 (c'était si difficile de refaire la statue ???)...

[img]http://www.sangonet.com/hist/FichHistoire/10mai2010-AEDumas/1-Monument-momm-abolesclav-gAD1.jpg[/img]

...ou que la miteuse stèle à Evry qu'on a érigé (mais après tout, c'est à Evry, donc il ne fallait pas non plus s'attendre à des miracles) : c'est sympa, ça fait parcmètre... :?

[img]http://4.bp.blogspot.com/_6HI4nECGs-4/Sk8inn3QFII/AAAAAAAAH0Y/FIFLTdbqpWI/s1600/Evry+Daily+Photo+-+A+la+memoire+du+diable+noir+-+Stele+Thomas+Alexandre+Dumas+2.jpg[/img]

C'est d'ailleurs dommage que toutes ces statues détruites pendant la guerre, dont il reste parfois trace pour les curieux (ou des stèles mêmes !), mais la mode est au bidule qui rouille entre urinoir Duchamp et machin ludique pour rigoler.

Exemple, à l'angle de la rue Jussienne et de la Rue Etienne Marcel, en plein centre de Paris, à deux pas des Halles, un étron à tags érigé en 1989 (mais puisqu'on vous dit que c'est de l'ard et que vous n'y comprenez rien !) :

[img]http://bouloboulo.free.fr/Public/Image.php?fichier=..%2FPhotos%2F574.jpg&larg=664&haut=1000&new=&comment=[/img]

***

Ici la plupart des statues détruites en 1942 par les Allemands :
[url]http://paris1900.lartnouveau.com/paris00/statues_de_rues1/statues_rues8.htm[/url]

Ah... si au moins un parti avait l'idée de proposer leurs reconstruction au lieu de piscines dans des stations de métro pour les municipales... (nager parmi les rats ??? allô ???)

Allons, un jour, les gens redeviendront raisonnables, et les décideurs se proposeront de revenir à essayer de faire du beau et des choses à taille humaine (je croise les doigts pour voir ça de mon vivant).

***

Décidément, j'aime bien divaguer ici et faire un peu du coq à l'âne... Mais j'aime ça ! :D